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Littérature
par Patrick Schindler le 1 mai 2024

Mai, mai, mai, Patrick mai... Mai, mai, mai, rat noir !

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En mai, l’Italie est à l’honneur avec Senilita d’Italo Svevo et Les lunettes d’or de Giorgio Bassani. Direction l’ex-URSS et La Terreur sous Lénine de J. Baynac, A. Skirda et C. Urjewicz. Espagne : Hommage à Ramon Acin par Les Tireurs de l’oubli. France : Le songe de Monomotapa de Jean-Bertrand Pontalis ; violences faites aux hommes : Justhom, un homme méprisé, humilié, martyrisé par sa « compagne » et enfin libre. Pour terminer en beauté : Un bon petit diable de la Comtesse de Ségur, revu par les wokes puis, étape japonaise avec Et si les chats disparaissaient du monde de Genki Kawamura.

« Les jouets courants sont essentiellement un microcosme adulte,
Comme si l’enfant n’était en somme, qu’un homme plus petit,
Un homusculus à qui il faut fournir des objets à sa taille
» !...
Roland Barthes, mythologies



« Hiver » de Gabriel Marian, (peintre roumain). Exposition internationale au Zappio d’Athènes, 2024. Photo Patrick Schindler

Italo Svevo : Senilita



Italo Svevo, littéralement « Italien Souabe », est le pseudonyme d’Ettore Schmitz. Né à Trieste en 1861, d’un père juif allemand et d’une mère italienne, il passe une enfance heureuse dans une famille de huit enfants. Eduqué dans des établissements hébraïques, son père l’envoie continuer ses études en Allemagne pour devenir négociant. Il y découvre les grands penseurs classiques allemands. N’ayant plus la force d’affronter la volonté de son père, il se marie et travaille dix-huit ans dans une banque, avant de se tourner vers la littérature. Ami de James Joyce, il s’intéresse à la psychanalyse et ne connaitra la célébrité qu’à l’âge de 63 ans avec Zeno, écrit pendant la Première guerre mondiale et publié en 1923 (recensé dans le Rat noir de juillet 2023). Il a souvent été comparé à un « Marcel Proust, version italienne » !



Lorsque l’on aborde une œuvre telle que Senilita, de Italo Svevo (éd. Points poche), on est en droit de se demander si une préface (aussi pertinente est-elle), est bien à sa place au début d’un ouvrage aussi complexe. Aussi est-il peut être préférable de ne la lire qu’à la fin ? Quoi qu’il en soit, on peut retenir que Senilita a été écrite par Italo Svevo, sous l’influence de ce que son préfacier qualifie de « règne du sans issue ». A l’inverse de son célèbre roman La Conscience de Zeno (voir le Rat noir de juillet 2023), paru 25 ans plus tard, qui lui, embrasse une bonne part d’ironie et un scepticisme revendiqué, au sujet de la psychanalyse.

Trêve d’exégèse pour entrer sans transition dans l’univers égocentré d’Emilio Brenati, le héros du roman. Avec au premier plan, sa sœur unique, Amalia « Aussi encombrante que possible qui ne vivait que pour lui, avec l’abnégation d’une mère ». Au second plan, la carrière d’Emilio : « elle, était plus complexe » … En effet ce dernier jouit d’un modeste emploi modeste dans une compagnie d’assurances, tandis que son second métier, écrivain « ne lui rapportait d’autre bénéfice qu’un semblant de réputation ».
Dès les premières pages, nous voici prévenus : Emilio vit dans un monde de faux-semblants où tout est artificiel, pour ne pas dire mensongé. Que ce soient ses rapports avec sa sœur Amalia, ou ceux qu’il entretient avec son meilleur ami, sculpteur et tyrannique, Stefano Balli, (dont sa sœur est amoureuse) ; ou encore, la relation d’Emilio avec la belle Angiolina, son amoureuse, « qu’il n’a de cesse de transformer à son goût ».

C’est au fil du style inimitable d’Italo Svevo, que nous allons suivre le déroulement tumultueux des rapports entre ces trois principaux personnages, « tous aussi égoïstes que vains ». Jalousies, mensonges, frustration, masochisme et pulsions destructrices, avec de-ci de-là des scènes dignes des meilleures pièce de Molière. Et l’apothéose finale avec la découverte du secret d’Amalia ! Un vrai plaisir.

Giorgio Bassani : Les lunettes d’or



Giorgio Bassani est né à Bologne mais passe son enfance et sa jeunesse à Ferrare. En 1939, il sort, diplômé de la faculté des lettres de Bologne. Juif, il est victime des lois raciales de 1938 et est obligé de publier en 1940, son premier livre Una città di pianura, sous le pseudonyme de Giacomo Marchi. Militant antifasciste, il est incarcéré en mai 1943, à la prison de Ferrare. Il est libéré le 26 juillet. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, il part pour Rome où il tente sa chance au cinéma comme scénariste, mais également comme acteur. Il adhère à cette époque au Parti socialiste italien. Dans les années 1950 et 1960, son importante production littéraire paraît à un rythme soutenu.



Dans sa préface des Lunettes d’Or (éd. Folio), Muriel Gallot nous offre, non seulement la genèse du roman, mais également de toute l’œuvre de Giorgio Bassani, « symbolisée par les lieux d’isolement ».
Passons au récit qui commence en 1919 : « Tout de suite après-guerre pour des raisons d’âge, je ne puis donner qu’une image plutôt vague et confuse de cette époque. Epoque agitée à Ferrare entre maximalistes paysans et ouvriers, anciens combattants et fascistes, jusqu’à ce que ceux-ci accèdent au pouvoir ». Suit un focus sur un des citoyens de Ferrare : le docteur Fadigati. Praticien originaire de Venise, respectable, apolitique et aisé, à la conduite irréprochable.
Du moins, en apparence : avec son embonpoint et ses lunettes cerclées d’or. Pour autant, les habitants de la ville qui le croisent, se demandent : « Pourquoi ne se marie-t-il pas ? En serait-il ? ». En tous cas, rien de concret (jusqu’à présent), ne le prouve ! Les années passent. La guerre d’Espagne, la victoire de Franco, du fascisme et puis l’apparition des premières lois antisémites qui, y compris en Italie, prônent la ségrégation des Juifs italiens « de nationalité équivoque » …
Mais aussi, « une grande méfiance sur tout ce qui est étranger et socialement louche », dont, bien sûr, les communistes, les homosexuels et bientôt, les Juifs. Alors, les gens bienpensants commencent à se demander : « Et si le docteur Fadigati était un peu de tout cela ? » ... Nous changeons alors de décor pour nous retrouver dans l’espace fermé d’un compartiment de troisième classe du train qui fait Ferrare/Bologne, avec à son bord, un contingent d’étudiants. Et le docteur Fadigati qui fait beaucoup d’efforts pour se joindre à leur petit groupe. Mais c’est dans un nouveau décor (une station balnéaire de la côte Adriatique) que l’action du roman va alors s’enflammer, bien que sur un rythme « tout italien » sur les premières lois antisémites sous le régime fasciste de Benito Musolini …
Découverte troublante de l’Italie de cette sombre époque.

J. Baynac, A. Skirda et C. Urjewicz : La terreur sous Lénine



Charles Jacquier introduit ce volume consacré à La terreur sous Lénine (éd. L’Echappée), ou plus exactement à la « vraie face » de Vladimir Ilitch Oulianov. Celle cachée que le préfacier éclaire d’une lumière crue : « Lénine ou l’inventeur d’un régime de Terreur qui n’avait rien de conjoncturel » et que ce dernier introduisit en Russie, dès décembre 1917.
Une de ses premières mesures fut en effet, de créer la Vétchéka (commission dite « contre la contre-révolution et le sabotage »), devenue ensuite le Guépéou en 1922, puis le NKVD en 1934, (dont une des directions dirigea le réseau des camps de concentration russes !) Un de ses proches de l’époque, un certain Léon Trotski, réclamant pour sa part, rien de moins que l’étatisation des syndicats et la militarisation de la main d’œuvre ! Deux tristes individus s’il en est, dont les actes vont être longuement décortiqués, analysés et commentés dans cet ouvrage.

Dans sa conclusion, Charles Jacquier se demande à juste titre « Pourquoi tente-t-on aujourd’hui de réhabiliter Lénine, trente ans après l’implosion de l’URSS, en accablant Staline ? Pour "sauver le soldat Vladimir", ce grand pourfendeur des anarchistes, des socialistes révolutionnaires et des sociaux-démocrates ? ».

Et ce sont justement les voix de ces derniers que vont nous faire réentendre Jacques Baynac, Alexandre Skirda et Charles Urjewicz, au travers de ces pages écrites en 1975. On y découvrira, entre deux horreurs, nombre de textes peu connus, écrits durant les années 1920, complétés dans cette réédition, d’articles de Michel Huelle, parus en 1977.
Dans le premier chapitre « Socialisme ET Barbarie », Jacques Beynac nous montre comment en deux ans, « le cancer policier a eu raison de la révolution de 1917 », en réexaminant toutes les phases ayant mené à la dictature. Sous la bannière de la célèbre formule de Trotski et Boukharine : « Sous la dictature du prolétariat, deux, trois, quatre partis peuvent exister, mais à une condition : que l’un soit au pouvoir et les autres en prison » ! Nous allons assister alors au long délire tchékiste (dit « l’Etat dans l’Etat ») contre tous les prétendus « contre-révolutionnaires ».
Puis, à partir de janvier 1920, malgré l’abolition officielle de la peine de mort, Alexandre Skirda prend le relais pour nous parler de la « Terreur rouge », responsable au total, de pas moins de 2 millions 400 morts (répressions, déportations et exécutions comprises) ! Suit un petit développement très intéressant montrant en quoi « Lénine n’avait rien de marxiste » … Une série de textes stupéfiants, vieux de 40 à 45 ans décrivent ensuite les dérives totalitaires de la « Tchéka panrusse centralisatrice » (articles, décrets et documents officiels, traduits du russe par Alexandre Skirda). Tous sont unanimes pour dénoncer la « Terreur rouge » s’étant déployée de 1918 à 1924, contre les « ennemis de la patrie » : anarchistes, socialistes révolutionnaires de gauche, pacifistes tolstoïens, makhnovistes, mencheviks, cosaques, religieux, etc. Et ce, aussi bien dans le Don, qu’au Kouban, en Crimée (appelée le cimetière de toute la Russie), qu’en Sibérie, en Géorgie, en Ukraine, en « Russie blanche », au Turkistan et chez les Tatars. Témoignages glaçants de familles et de survivants. Les données recueillies dans ces documents, sont ensuite corroborées par des matériaux issus du Bureau central du Parti socialiste révolutionnaire russe, datant de 1922 ! Plus loin, il est question de la funeste « prison intérieure », (la Vetchéka moscovite), sur la base du témoignage oculaire d’un survivant. Bienvenue dans l’univers concentrationnaire soumis à l’arbitraire, digne du meilleur roman de Kafka !
Sous la plume de P. Silène, nous allons revivre ensuite, les sombres heures du massacre perpétué par la Tchéka sur les ouvriers grévistes d’Astrakhan, au début de 1919.
Le chapitre suivant évoque la répression exercée sur les anarchistes depuis 1917, sur la base d’un document écrit en 1923, par le Groupe des anarchistes russes exilés en Allemagne.
Pas le temps de souffler, car est abordée ensuite, la répression makhnoviste en Ukraine après le traité de Brest-Litovsk, « vivement critiqué par les anarchistes ». Féroce répression qui fera dire à Léon Trotski : « Enfin le pouvoir soviétique balaie l’anarchisme avec un balaie de fer » !
Un long chapitre est alors consacré aux douze socialistes révolutionnaires condamnés à mort à Moscou, en 1922, d’après un texte de W. Woïtinsky, paru à Berlin la même année. Nous allons découvrir, comme hallucinés, le contexte à peine imaginable du procès, observé (de loin !) par l’ensemble du mouvement ouvrier international. Puis la pression exercée sur les rares observateurs étrangers autorisés à suivre le procès. Passage surréaliste : la « mise en scène » d’un Trotski « faisant le tour des popotes » dans les usines, afin de contraindre les ouvriers à signer une pétition (qui ressemble plus à une injonction) pour la mise à mort des condamnés (et ceci nonobstant les accords de Berlin).
Suit un texte édifiant de Martov « A bas la peine de mort », paru à Paris en 1919, qui dénonce l’attitude révoltante des Bolcheviks sur ce sujet.
Un autre chapitre est consacré à « la contre-terreur révolutionnaire », ou plus exactement aux conditions de « l’attentat de l’anarchiste Kovalévitch » contre le siège du parti communiste à Moscou, toujours en 1919.
David Charachidzé décrit ensuite en détail, l’horrible répression de la Tchéka en Géorgie, à partir de 1921, dans le but de « terrasser le seul régime menchévik qui avait pourtant réussi à se maintenir en Russie tzariste ». Répression particulièrement violente, contrairement à ce que put en dire un certain, Henri Barbusse…
Raymond Duguet nous décrit alors, les horreurs commises à Solovki, dite « l’île de la faim ». Document basé sur des témoignages directs, contrecarrant parfois, le récit imparfait qu’en fit Soljenitsyne. Isaac Z. Steinberg, fort de son expérience, s’interrogeait déjà en 1923, sur « l’aspect éthique de la révolution ayant basculé à partir d’octobre 17, entre terreur et violence, le tout bien orchestré par l’intelligentsia révolutionnaire ».
Enfin, Michel Steller conclue par « Lénine et la Vetchéka ou le vrai Lénine », texte datant de 1977, écrit sur la base de nombreux documents émanant du KGB lui-même, donc irréfutables.

En refermant la dernière page du volume, on se rend compte combien nous sommes éloignés de l’image du « Lénine petit père du peuple, juste et bon » que bien des biographes ont voulu nous présenter et qu’il n’est plus du tout possible après lecture, de nous faire avaler. « Un livre glaçant, mais incontournable », m’a fait très justement remarquer Cédric, des éditions L’Echappée, en me l’adressant à Athènes. Glaçant et incontournable effectivement !


Les Tireurs de l’oubli : En hommage à Ramon Acin



Autre petit fascicule tout aussi incontournable : « En hommage à Ramon Acin » (éd. Bibliothèque des Tireurs de l’oubli, Félip et Maryvonne), consacré à cet artiste aragonais anarchiste et très peu connu au nord des Pyrénées né en 1888 à Huesca, qu’une amie m’a acheté au CIRA (Centre International de Recherches anarchistes) de Marseille.
Dans un premier temps, c’est Félip Equy qui nous dresse le parcours édifiant de ce militant anarchiste. En effet, ce dernier collabora à de nombreuses revues anarchistes, participa aux Congrès de la CNT et refusa de devenir maire de sa ville ! Ses écrits lui valurent plusieurs séjours en prison et plusieurs années d’exil à Paris (1926/31), avant d’être fusillé par l’armée et la Garde civile, avant la révolution, en 1936 ...
Félip Equy trace ensuite le portrait du pédagogue, professeur de dessin à l’Ecole normale de Huesca, avant d’évoquer l’écrivain écologiste, végétarien et naturaliste grand défendeur de la cause animale. L’artiste ensuite : ami de Dali, Picasso et Buñuel et Federico Garcia Lorca.
Enfin, Félip Equy évoque les sculptures de Ramon Acin (non détruites ou cachées par les franquistes), ainsi que la production du film de Buñuel, Terre sans pain.
Pour conclure l’ouvrage, Emilio Casanova reprend la chronologie complète de la vie et l’œuvre de Ramon Acin, le tout agrémenté d’illustrations, dont ses fameuses cocottes en papier ...



Sculptures en hommage à Ramon Acin sur la place de Huesca
… ou ses « Pajaritas », « symbole de l’oiseau migrateur, espiègle et joueur qui rappelle l’enfance » et sont devenues l’emblème du pliage de papier dans toute l’Europe.
Le petit fascicule se referme sur Paroles, un texte d’Acin, paru en 1929. Bel hommage à cet artiste qui avait pour devise :
« Nous avons pour drapeau l’amour de la culture, le culte de la fraternité et de la liberté » …

Jean-Bertrand Pontalis : Le songe de Monomotapa



Jean-Bertrand Pontalis est né le 15 janvier 1924, à Paris. Il fait ses études secondaires au lycée Pasteur et au lycée Henri-IV puis, à la Sorbonne. En 1945, il obtient son diplôme d’études supérieures en philosophie pour son étude sur Spinoza. Elève de Jean-Paul Sartre, il a collaboré à la revue Les Temps modernes (1945-1948) avant de s’engager ensuite dans des mouvements politiques de gauche. Il devient psychanalyste avant d’être enfin reconnu comme écrivain et éditeur.



Ainsi commence Le Songe de Monomotapa (éd. Folio) : « Quand nous nous réunissions pour décider du prochain thème dont traiterait, La Nouvelle Revue de psychanalyse, il est arrivé plusieurs fois, que notre choix se porta sur l’amitié. Car sur la relation au père, à la mère, sur l’amour et la haine, la psychanalyse à la suite de Freud, n’avait cessé de le faire. Mais, sur l’amitié, quasi-silence freudien. Or, ce projet de la revue de traiter de l’amitié ne s’est jamais réalisé. Pourquoi ? Je n’en sais trop rien ».
Pontalis nous livre alors quelques hypothèses et nous explique pour quelles raisons il n’a pas pour autant renoncé à écrire un éloge de l’amitié. « Pourquoi l’ami véritable dont parle La Fontaine n’existerait pas ? Pourquoi Monomotapa serait-il un songe ? » …
Suivent donc toutes sortes de considérations sur les différents types d’amitiés entre hommes et entre femmes : passionnées, particulières ou homosexuelles refoulées, ou encore suscitant la jalousie des conjoint(e)s. Evocation d’amitiés célèbres (celles décrites dans L’Iliade, ou dans les ouvrages de Jean-Jacques Rousseau, Charles Baudelaire, Marcel Proust, Charles Péguy, René Char, Hélène Barr, Albert Camus, etc.). L’auteur se fait ensuite plus personnel en évoquant ses propres expériences par thèmes. Amitiés de lycée ; amis durant la période de l’occupation ; « meilleurs amis » et « raisons de l’amitié ». Mais également : l’amitié avec des livres, avec des lieux ou des paysages. Quid de la différence entre amitié et camaraderie ? Pontalis se demande aussi ce qu’on bien pu devenir tous ces amis ? Leurs visites durant ses rêves. Passage passionnant sur les amitiés imaginaires des enfants, ainsi que sur « ce qui se partage dans l’amitié et ce qui sépare ». Pourquoi certaines amitiés se dissolvent ? Les amitiés éphémères et ce que l’on peut dire ou non, sous couvert d’humour dans une relation amicale ! L’amitié est-elle un moyen de se soustraire à la violence du monde ? Quid de la « fillia » grecque ? L’ami est-il quelqu’un à qui l’on peut « tout dire vraiment et en toute confiance » ? L’amitié peut-elle se retourner en son contraire ? Quid des amis « venus de loin », ou des « amitiés de correspondance », ainsi que des amitiés improbables (comme celle d’Antonin Artaud et de Jacques Rivière) ? Enfin, conclusion attendue sur « l’ami véritable » ou, « les deux amis idéaux du Monomotapa de Jean de La Fontaine » ...

Justhom : Un homme méprisé, humilié, martyrisé par sa « compagne » et enfin libre !



Mon ami Justhom, ancien marin, féministe et militant anarchiste, est enfin parvenu à sortir de son long calvaire. Il y a quelques années, alors qu’il était encore en plein cauchemar, je l’avais aidé à structurer et à mettre en forme son Journal d’un enfer. Il l’avait publié à compte d’auteur, comme une sorte de thérapie. Après s’être enfin libéré de ses chaînes, il vient de compléter son récit et de l’éditer aux éditions Libertaires.
Mais, avant d’entrer dans « le vif du sujet », Justhom nous gratifie d’une lettre émouvante. Elle est destinée à son petit-fils Simon, dont il s’est occupé « avec amour, durant toutes ces années d’horreurs partagées », ainsi que la réponse toute aussi émouvante de Simon. Les deux lettres tenant lieu de dédicaces.
Justhom nous raconte ensuite par le menu, la douloureuse histoire de son petit-fils. Ecartelé entre un père irresponsable et une mère suicidaire, dont Justhom va également nous raconter la courte vie. Alors que Simon n’avait que cinq ans ce furent alors, Monique et Justhom qui le récupérèrent. Monique, la première compagne de Justhom et grand-mère de Simon qui se transforma contre toute attente, en marâtre de l’enfant. Justhom nous décrit le processus infernal par lequel Monique, « femme castratrice, manipulatrice et intéressée, en véritable mante religieuse, s’est enfoncée lentement mais sûrement, dans la paranoïa et la méchanceté ». Et entreprit sur lui et son petit-fils une « véritable entreprise de destruction ».
Episode décrit dans la première partie du livre, Journal d’un enfer. Enfer qui a duré de juin 2018, à janvier 2023. A la fin de cette lecture terrifiante, on en reste comme… « médusés ». Difficile d’imaginer pareille horreur, que nous vous laissons de soin découvrir…
Mais si Justhom a décidé de la raconter, c’est principalement afin de « Prouver qu’il n’y a pas de fatalité et que l’on peut sortir de la soumission et de la domination, que l’on peut briser le mur du silence et de la culpabilité. Ne pas se taire, mais dénoncer, révéler et montrer que la violence physique et morale n’est pas réservée qu’aux seules femmes et que des hommes en sont également victimes ».
Heureusement, dans Enfin libéré, la seconde partie du volume, Justhom nous raconte sa lente sortie du tunnel. Sa rencontre opportune avec sa nouvelle compagne, Annie, à l’occasion d’une dédicace en 2023. Leur complicité immédiate, leur sensibilité culturelle similaire, leur vision commune « de la vie, du partage et de l’échange et le tout, avec l’anarchie au cœur » ! Bref, un monde situé aux antipodes de celui de l’effrayante, de la terrifiante, Monique. « Depuis, je me sens redevenir un être humain. J’ai enfin retrouvé ma dignité » !

Un bon petit diable de la Comtesse de Ségur, revu et corrigé par les wokes !



Une amie, Barbara Pascarel (essayiste, spécialiste, entre autres, de Léon Paul Fargue) m’a apporté de Paris, une version irrésistible du Bon petit diable de la Comtesse de Ségur, « revue et corrigée par… les wokes » ! Délicieux : c’est pratiquement tout le corps du texte qui est passé sous le « rouleau compresseur » de l’intraitable censure woke, « anti-classiste, anti-sexiste, anti-colonialiste, anti-ceci, anti-cela » ... Ce qui fait qu’au final, pratiquement plus rien ne restera du texte original ! Jusqu’au titre qui sera transformé en : Une aimable personne non-genrée en difficulté d’insertion sociale ! Petit ouvrage incontournable à commander d’urgence, auprès des éditions du Club Samizdat, contact mail : edi-delatur@gmail.com

Genki Kawamura : Et si les chats disparaissaient du monde…



Genki Kawamura est né à Yokoha, (Japon) en 1979. Véritable phénomène au Japon, il est l’auteur de romans, d’interviews, essais et également réalisateur de cinéma.



En préambule, le narrateur de Et si les chats disparaissaient du monde... (Ed. Pocket, traduction du japonais, Diane Durocher), écrit-il à son ex-petite amie : « Je vais bientôt mourir. Mais commençons par le commencement. Ça risque d’être un peu long comme lettre, mais lis-la jusqu’au bout s’il te plait ».
Pourquoi ce message ? Tout simplement parce que notre narrateur, facteur de trente ans, vient tout juste d’apprendre qu’il est atteint d’un cancer stade 4, et qu’il lui reste au mieux six mois à vivre. Comme il se doit en pareil cas, il est terrassé. Parvenant malgré tout à rentrer chez lui, il se retrouve en face « d’un individu qui lui ressemble physiquement, mais habillé d’une drôle de façon pour quelqu’un qui se prétend être le diable : en short et chemise hawaïenne ». Ce dernier lui annonce qu’en fait, il doit mourir dès le lendemain. Il lui propose alors un pacte : il acquerra un jour en plus de vie, s’il accepte de faire disparaitre quotidiennement, « une chose » du monde.
Facile à dire, mais beaucoup moins à faire ! Nous allons alors croiser durant ses derniers jours, toute une série de personnages atypiques et cocasses : son ex-petite amie ; son meilleur ami cinéphile solitaire ; un chat qui parle, etc.
Mais comment va se terminer ce récit énergique, truffé d’humour. Vérités et contre-vérités égrainées tout au long d’un parcours situé entre hésitations et plus ou moins bonnes résolutions.
Genki Kawamura agrémente ce petit conte de nombreuses citations et références à des héros de films ce qui n’altère en rien une profonde réflexion philosophique sur le sens de la vie. Et une fin aussi onirique que l’on peut s’attendre de la d’un jeune auteur japonais bourré de talent. Délicieux !

Patrick Schindler, individuel FA, Athènes







PAR : Patrick Schindler
individuel FA, Athènes
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1

le 6 mai 2024 15:22:26 par Lola Sémonin

Cher Pat,
Mais quelle profusion, tous ces livres que je ne peux pas lire !
Les lis tu vraiment tous?
Je me nourris des titres et des noms des auteurs.
Merveilleux rat noir, je t’aime et je t’embrasse

Lola Sémonin

2

le 6 mai 2024 15:24:33 par Le rat noir

Chère Lola,

Merci pour ton message : figure-toi que bien sûr je les lis tous et il est vrai je ne commente que ceux que j’aime parmi ceux que je reçois des éditeurs indépendants.
C’est une telle thérapie que la lecture pour nous éloigner un peu de ce monde qui souffre et qui saigne !
Merci pour ton adorable message
Bisous
Pat

3

le 6 mai 2024 17:25:33 par Corinne

Cher Rat noir,
Comme j’ai ma dose de violence, j’opterai pour Et si les chats disparaissent du monde de Kawamura. Merci pour ce conseil de lecture
Corinne

4

le 6 mai 2024 17:32:00 par Jacques de Quilombo

Cher Patrick, merci pour ton article sur La terreur sous Lénine, je la transmetsCharles Jacquier qui en sera bien content...
Amitiés,
Jacques

5

le 7 mai 2024 14:11:27 par Stéphane Sangral

Cher Patrick,
M’a particulièrement intéressé le livre de Justhom ( forcément un pseudo, ou alors ça tombe trop bien... ), en ces temps de misandrie décomplexée...
Merci pour tout ça au raton-lecteur,

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le 12 mai 2024 09:47:37 par Hélène Schebat

Grazie mille per le sul impressioni su Senilita ed anche Giorgio Bassini...
Hélène

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le 12 mai 2024 09:50:04 par Anne-Laure B.

Merci Patrick, j’adore JP Pontalis, à recommander également : L’amour des commencements... Anne-Laure Brisac, Signes