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par Patrick Schindler le 3 novembre 2023

Novembre, le rat noir toujours plongé dans des livres.

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Pour fêter son 4e anniversaire, le Rat noir vous propose un numéro de novembre qui commence sous un signe pour le moins sérieux. En effet, démarrage brutal avec Sonderkommando de Marcel Nadjary, qui raconte une des pages les plus noires de l’histoire grecque, la déportation en masse des Juifs. Petite pause Science-fiction : Fonte brute de Sofronis Sofroniou. Puis, direction l’Angleterre avec la version de Stéphanie Hochet, sur les « années perdues » de William Shakespeare. L’Allemagne, ou relire Schelling avec des yeux neufs. Une « petite » promenade de quatre siècle (!), dans les Balkans, avec Le Pont sur la Drina de Ivo Andric. Retour en Mitteleuropa, avec Rédemption et Utopie de Mikael Löwy, ou le judaïsme libertaire en Europe centrale. Ludique et optimiste : Le Premier combat ou l’utopie, selon Yves Bichet, avant une dernière grande claque (au sens propre) : Irish Draft de Lawrence Aragon.

« Ceux qui s’aiment et qui sont séparés peuvent vivre dans la douleur, mais ce n’est pas le désespoir, ils savent que l’amour existe » Albert Camus, L’été.



Statue du Musée archéologique d’Athènes. Photo Patrick Schindler 2023.
En passant devant, je me suis demandé si ce jeune homme n’en avait pas « sa claque » d’être observé et photographié toute la journée par des hordes de touristes !...


Marcel Nadjary : Sonderkommando



Marcel Nadjary (1917-1971) était un Juif-grec originaire de Thessalonique. Résistant durant la Seconde guerre mondiale, il fut plusieurs emprisonné par les nazis, puis déporté et incorporé contre son gré, dans le funeste Sonderkommando de Birkenau (Auschwitz II), de la mi-mai 1944, à la mi-janvier 1945.




Sonderkommando est le titre du livre qui raconte l’incroyable histoire de Marcel Nadjary, coédité par les éditions Artulis et des éditions Signes et balises [note]. Les deux éditrices, Anne-Laure Brisac (pour S&B) et Pierette Turlais (pour Artulis) introduisent cet ouvrage, en nous racontant avant tout, comment le premier des deux manuscrits de Nadjary, a été miraculeusement retrouvé, enfoui parmi les décombres d’Auschwitz. Celui-ci s’ouvre sur une lettre de Maurice Nadjary, adressée à « ses chers amis ».
Elle est datée de Birkenau, le 3 novembre 1944. Dans ce texte bref, visiblement écrit dans l’urgence, Nadjary explique dans quelles circonstances il s’est retrouvé, après sélection des SS, incorporé dans le funèbre Sonderkommando ou « comité d’accueil (sic) » des condamnés au gazage. Funèbre oui, car ces 200 Juifs grecs, hongrois et polonais étaient voués à plus ou moins long terme à disparaitre, « afin qu’ils ne laissent aucune trace de ce qu’ils avaient vu et vécu ».
Puis, Marcel Nadjary reprend toute l’histoire depuis son « incorporation ». A commencer par comment il a appris à répondre aux questions posées par les nouveaux arrivants, à la suite de quoi, on se sent obligé de TOUT lire. Ce qu’il va nous décrire au jour le jour, « l’ensemble de la chaîne », du déshabillage à la douche et du transport des cadavres des chambres de gazage jusqu’aux fours crématoires, etc. Enfin, il nous raconte ce qui l’a motivé à cacher ses feuilles manuscrites dans une bouteille thermos et l’enfoncer dans le sol marécageux de Birkenau, « afin de tout raconter et de venger son père, sa mère et sa sœur chérie ».
Le second manuscrit de Nadjary date d’avril 1947. Ayant miraculeusement échappé à la liquidation « finale » du Sonderkommando, Maurice décide de reprendre et compléter son récit, remontant au 28 octobre 1940, jour de la mobilisation générale en Grèce. Il nous explique les raisons des conflits internes durant la Résistance grecque, les circonstances de son arrestation, les violences qu’il a subi des SS, etc. Ici, il reprend en détail son mois de mise en quarantaine et surtout les conditions inhumaines décrétées par les SS, dépassant l’imagination. La pénibilité de certains passages est compensée par des récits précieux, notamment sur les deux tentatives (ratées) de révoltes des Sonderkommando. Son récit s’achève sur comment lors de circonstances extraordinaires il put une fois encore, échapper à la mort.
A la suite de ces deux manuscrits (dont la page gauche reproduit la photo des originaux), Serge Klarsfeld inaugure la seconde partie du volume. Il nous explique pour quelles raisons à son sens, « les témoignages rédigés pendant les événements, récupérés dans les décombres d’Auschwitz, puis publiés dans leur authenticité intégrale, sont de la première importance pour les chercheurs ». Il tend ensuite la plume à Nelly Nadjary (née en 1957), la fille de Marcel Nadjary. Celle-ci évoque entre autres, « ce père affectueux et plein d’humour qui ne voulait pas lui parler des épreuves qu’il avait enduré à Auschwitz, espérant qu’un jour "elle saurait" » ! Puis c’est au tour de son frère, Allberto (né en 1950), d’évoquer les quelques souvenirs de son père, leur vie aux États-Unis, sa mère, également survivante des camps que Marcel rencontra à Paris en 1945…
Fragiski Ampatzopoulou nous explique pour sa part, la complexité des données chiffrés dans le premier manuscrit. Puis, dans quelles circonstances celui-ci fut découvert, ainsi que le second sauvegardé par sa famille. Ceux-ci considérés par l’historien britannique de la Shoah, Dan Stone « comme les documents les plus importants dont on dispose sur les camps d’extermination ».
Ampatzopoulou nous explique ensuite ce qui a provoqué l’incompréhension du public pour ce qui concerne la « pseudo-complicité » des membres du Sonderkommando, tandis que ses quelques survivants tentaient de s’expliquer.
Georges Didi Huberman nous révèle les difficultés auxquelles durent faire face les chercheurs pour « redonner vie » au premier manuscrit, retrouvé pratiquement illisible.
Dans Auschwitz, printemps 1944, Tel Bruttmann nous explique en quoi ce printemps-là fut une période charnière et particulièrement effrayant dans l’histoire d’Auschwitz, ainsi que le tri qu’il convient de faire entre les différentes sources souvent contradictoires. Il met ensuite en relief le vocabulaire multi linguiste utilisé dans les camps. Il s’interroge aussi sur les raisons pour lesquelles Nadjary a, jusqu’à la fin, voué un tel amour pour la Grèce, sa patrie. Ce qui nous vaut un passage passionnant sur l’histoire des Juifs de Thessalonique, surnommée alors « la Jérusalem des Balkans ». Enfin, Andreas Rilian nous présente les témoignages du reste de la famille et des proches de Nadjary et d’autres des quelques survivants du Sonderkommando.
Non seulement ces deux livres sont une véritable mine d’informations, un magnifique cri d’espoir, de résistance active et de solidarité, mais sont surtout : une gigantesque claque donnée à tous les négationnistes et autres révisionnistes !

Sofronis Sofroniou : Fonte Brute




Sofronis Sofroniou, né à Chypre en 1976, a étudié la psychologie à Nicosie et les neurosciences à New York.
Son surprenant Fonte brute (éd. Zulma), commence ainsi : « J’étais joueur d’échec à Union square. Je peux l’affirmer avec certitude, c’était pour aussi dire mon métier avant que je ne quitte la terre. Je suis mort le 5 mai 1948, à 66 ans. A mon arrivée sur Petite vie, je me suis retrouvé dans une petite salle plongée dans la pénombre. J’ai distingué une porte, je l’ai ouverte » …
Ce qui frappe d’abord notre héros, c’est qu’il se retrouve à l’âge de vingt ans, tandis qu’on vient de lui accorder une dizaine d’année de « rab » de vie sur cette planète. Privilège qui lui est accordé en raison de sa carrière universitaire sur Terre. En effet, les habitants de Petite vie ont tous à cœur de « reconstituer » le passé, chacun dans son domaine. Lui est confiée, la mission de reconstituer l’intégral du roman d’un auteur qui a mystérieusement disparu de la planète, sans laisser de traces (tout comme d’ailleurs, un certain James Joyce !). On lui adjoint pour cette tâche, Bonnadea, une jeune femme et un Cubain énigmatique.
Mais sans qu’ils n’en comprennent la raison, ils sont détournés de leur destination et se retrouvent parmi les Hans, qui vivent dans les entrailles de la planète Petite vie. Leurs mœurs et leurs paroles répondent à des codes totalement incompréhensibles, « mouvant, changeants et incertains ». Nos héros, comprennent vite que les Hans ont, eux, comme objectif d’éradiquer toute mémoire terrienne. Rivalité entre deux mondes antagonistes ? N’en révélons pas plus. Bienvenus dans un voyage magique, espèce de tourbillon infernal au cours duquel nous allons évoluer tour à tour, dans un univers à la Sophocle ; à la Jules Verne ; Robert Musil ; Marcel Proust ; Franz Kafka, mais aussi, Alfred Hitchcock ; David Lynch ; Chris Market ; David Bowie ; Can ou encore, Radio Head … Bon voyage !

Stéphanie Hochet : William




C’est par ces mots que Stéphanie Hochet (qui après une maîtrise sur le théâtre élisabéthain, a enseigné en Grande-Bretagne), commence son essai William (éd. Rivages) : « Dans la biographie de William Shakespeare, une énigme demeure. Personne ne sait ce qu’il fit de 1585 à 1592, de ses 21 à ses 28 ans, donc. Ces années furent appelées "les années perdues" par les historiens en absence de sources ».
Et c’est dans cette brèche restée vierge qu’elle nous invite à embarquer, avec une « fougue débridée ». Elle commence par ce qui semble « acquis » concernant la, ou les biographies de « William ». Fils de John Shakespeare, négociant en peau puis, gantier à Stratford-upon-Avon. Pour sa part, « Will » est fasciné par la poésie latine et tout ce qui touche au théâtre : « suspens, effroi et grandeur ».
Stephanie Hochet nous raconte ensuite la rencontre de William (17 ans) et Anne Hataway (25), sa future femme, ainsi que leur vie de famille qui se promet d’être en somme, assez banale en ce XVIème siècle, dans cette petite ville de province anglaise. A tel point qu’un certain jour de 1585, William va tout envoyer valser pour suivre en tournée, la troupe des Comédien de la reine.
Son heure serait-elle enfin venue ? Quitte à laisser femme et enfants derrière lui ?
C’est là que l’impulsion de Stéphanie Hochet prend son envol et imagine comment le comédien en herbe, « a pu disparaitre comme l’ombre d’Hamlet qui s’évapore dans un souffle ». Durant ces sept mystérieuses années, d’autres biographes « l’ont imaginé d’école, voyageur en Italie, ou parti sur les mers : la réalité est qu’on n’en saura jamais rien » ! A chacun ses fantasmes. Celui de Stéphanie Hochet est d’alors s’appuyer sur sa propre expérience : ses propres fugues, dont la première dès l’âge de 3 ans ! Mais à l’image aussi de ces milliers « d’évaporés » japonais, qui disparaissent du jour au lendemain chaque année, « comme des gouttes de pluie qui fondent au soleil » ! Variations également sur les amitiés de William, le sulfureux et inquiétant Richard Burbage ou son ami intime, Barnabé. Sur son goût du travestissement ou l’homoérotisme qui imprègnent son œuvre « avec une sorte de gaité, de soulagement heureux ».
Bref, Stéphanie Hocher fouille, farfouille dans le flou, l’extrapolation et se permettant tout, puisqu’elle ne s’interdit rien !

Schelling : Le système de l’idéalisme transcendantal



Dans sa présentation du Système de l’idéalisme transcendantal de Schelling (rééd. Allia), son traducteur, Christian Dubois commence par nous expliquer comment le système du philosophe s’est finalement imposé comme étant « l’un de ses meilleurs ouvrages, puis a été inscrit au rang des classiques de la philosophie ». Schelling s’inspirant dans ses premiers écrits de Fichte puis de Spinoza et de l’étude de la Nature et du « processus dynamique ». Terminant le cycle de sa réflexion 1781, par son essai le plus abouti le conduisant vers l’élaboration de sa conception de la « philosophie de l’identité ». Démarche tendant à se démarquer « du cadre trop étroit de l’idéalisme transcendantal opposé à la Natür-philosophie, deux sciences éternellement en opposition et cependant complémentaires » …

La parole revient alors à Schelling lui-même. Il nous livre les « fondements de son système », rédigé fin mars 1780. A savoir, que l’idéalisme transcendantal repose sur un système de l’ensemble du savoir ayant pour objectif « l’exposition de toutes les parties de la philosophie en une seule, en un enchaînement continu, une histoire progressive de la conscience de soi pour donner à l’ensemble une cohérence interne
». Nous vous laissons découvrir tout cela.
Un détail, au passage, intéressera plus particulièrement les lecteurs anarchistes : Schelling considère que « l’explication théologique d’un objet ne peut absolument rien nous apprendre sur l’origine de cet objet » !
Pour lui, la théologie est à minima, « la seule voie susceptible d’expliquer d’une manière compréhensible, la coexistence du mécanisme et de la finalité dans la Nature » … Circulez !
Schelling nous invite à naviguer entre deux extrêmes : l’intuition intellectuelle et l’intuition esthétique. Car, pour lui : « seule l’objectivité absolue est donnée à l’art. Enlevez à l’art l’objectivité et il cesse d’être ce qu’il est et devient philosophie ; donnez l’objectivité à la philosophie et il devient art » !
Le philosophe allemand développe ensuite ce qu’il entend par intuition esthétique. Dans un autre passage passionnant, il nous propose de réfléchir sur la liberté « présupposée » dans la Nature. Ceci nous amenant tout naturellement à la notion de « libre arbitre ou d’activité consciemment libre ». Pour conclure sur : « L’art comme unification suprême de la liberté et de la nécessité ».

Ivo Andric : Le pont sur la Drina




Ivo Andrić est né le 9 octobre 1892 en Bosnie-Herzégovine (alors administrée par l’Autriche-Hongrie), dans une famille croate, devenue serbe après la Seconde Guerre mondiale. Il s’installe alors à Belgrade. Mais ses récits ont pour cadre la Bosnie ottomane. Diplomate avant la guerre, il se consacre à la littérature dès 1945. Lauréat du prix Nobel de littérature en 1961, il a été membre de l’Académie serbe des sciences et des arts. Il est l’auteur le plus traduit (en 40 langues) de la littérature serbo-croate.



« A l’endroit où la Drina surgit de tout le poids de sa masse d’eau écumante et verte, se dresse un grand pont de pierres reposant sur onze arches dominant la vie de Visegrad ».
C’est par cette phrase qu’Ivo Andric introduit Le Pont sur la Drina (éd Poche, traduction du Serbo-croate de Pascale Delpech).
Fierté de ses habitants, combien de légendes accompagnent la construction de ce fameux pont, commencée en 1566. Situé sur le territoire de la ville commerçante de Visegrad, il séparait alors, la Serbie (l’Orient) de la Bosnie (l’Occident) et était l’œuvre d’un garçon d’un village voisin, au destin singulier. A l’âge de dix ans, il fut enlevé avec d’autres enfants (les plus beaux et les plus sains) par les Turcs, afin qu’après avoir été circoncis et turquisés, ils deviennent janissaires dans un corps d’élite de l’Empire ottoman, tout puissant alors dans la région. Oubliant ses origines, après avoir été au service de trois Sultans, notre jeune garçon devint « le vizir Mohamed Pacha ». Son premier désir fut de construire le pont sur la Drina, une véritable obsession. Cela prit cinq ans et entraîna de difficiles et pénibles travaux et des moyens colossaux.
Ivo Andric va nous raconter toutes les phases, ainsi que toutes les péripéties et légendes qu’engendrèrent sa réalisation. Les villageois de Visegrad, Chrétiens, Musulmans, Serbes, Juifs ou Tziganes qui vivaient alors en relativement bonne intelligence, le disaient hanté « par les jumeaux emmurés dans une de ses arches, le Maure coupé en deux lors d’un accident ou encore, la fée qui démolissait jour après jours les premiers ouvrages réalisés ». Mais était-ce véritablement le fait d’une fée ? Car comme nous le précise l’auteur « A ce sujet, on croyait n’importe quoi, on murmurait n’importe quoi, mais c’est surtout la peur qui était la plus forte que tout ».
Après la disgrâce du vizir, son successeur prend le relais et devra également passer au travers des critiques et de la perplexité des habitants. Et ce n’est que cinq ans plus tard, en 1571, qu’enfin le pont est achevé. Nous sommes alors invités à traverser le cours du temps. Un siècle se passe, les événements s’enchainent (l’évacuation de la Hongrie, les inondations, etc.). Ivo Andric nous les fait vivre à travers le regard que pose sur eux les « fantasques et originaux » villageois de Visigrad. Un pur délice. Suit un autre siècle, d’autres conflits. La révolte des Serbes contre les Turcs et ses fâcheuses conséquences, etc. Le pont n’en devient que plus stratégique.
Après de nombreux chapitres, nous atteignons le milieu du XIXème, quand l’Empire turc « commence à achever de se consumer lentement », on parle alors de la création d’une frontière séparant Serbes et Bosniaques. La peste et le choléra menacent, les exodes se succèdent.
Tout ceci nous est raconté avec beaucoup de précision et dans un style très agréable.
Et puis, beau matin de l’été 1878, c’est l’armée austro-hongroise qui débarque. Il ne manquait plus que ça ! Les habitants de Visigrad, « peu pressés de se battre », résisteront-ils à l’envahisseur, ou resteront-ils aussi passifs que les générations précédentes ? Cela amènera-t-il « comme toujours à l’approche d’un ennemi plus puissant, haines fratricides et querelles intestines » ?
Pour l’auteur : « Après leur arrivée, les Autrichiens avaient peur des embuscades. Les Serbes avaient peur des Autrichiens et les Musulmans et les Juifs de tous » ! Comment vont réagir les responsables Chrétiens, Musulmans et Juifs ? Et le peuple ? Optera-t-il pour l’insurrection comme en Herzégovine ? Pour la résistance active ou passive ?

Durant toutes les époques qui traversent le roman, Ivo Andric nous régale de toutes sortes de petites historiettes et contes et de personnages (plaisantins, originaux, bouffons ou alcooliques) qui ne demandent qu’à entrer dans la légende. Et puis, nous en arrivons aux dernières années du XIXème siècle (l’assassinat de l’impératrice Sisi). Mais en ce début de siècle qui annonce déjà une future catastrophe, comment évolueront les nouvelles générations face aux nouvelles mœurs importées d’occident (le chemin de fer, les premières autos, les premières grèves, le socialisme) ? Et les vieux de se demander où aboutira tout cela ? Faudra-t-il à présent, ne survivre que grâce aux crédits et emprunts ? Quid des espoirs des jeunes révolutionnaires en herbe ? Car c’est à travers leurs yeux que nous allons vivre ce mois d’aout 1913, alors que se profile la fatidique année 1914, sur laquelle s’achève ce magnifique roman, « avec pour arrière-fond le grondement lourd d’événements nouveaux et de plus en plus insolites qui déferlaient en se recouvrant les uns les autres comme des vagues ». Visigrad, « la tolérante » résistera-t-elle à ce dernier flux belliqueux ?

Dans sa postface datant de 1994, Pedrag Mavejevitch pose et essaie de répondre à cette simple question : « Que penserait aujourd’hui Ivo Andric, auteur si méconnu en occident car ayant toujours refusé, malgré son prix Nobel toute publicité, de la guerre qui sévit aujourd’hui en ce début 1994 dans son pays ? Lui, l’écrivain Serbe orthodoxe par le choix de sa résidence, en dépit de ses origines croates catholiques, bosniaque par sa naissance et son appartenance et Yougoslave à part entière ? Les ponts réels ou symboliques qu’il a décrit ou bâtit dans ses ouvrages sont-ils brisés et détruits à jamais ? » ...

Mikael Löwy : Rédemption et Utopie ou le judaïsme en « Mitteleuropa »



Dans le premier chapitre de Rédemption et Utopie (éd. du Sandre), Mikael Löwy, s’arrête sur le concept clé de l’ouvrage. La notion « d’affinités électives » et plus précisément ici, entre le messianisme juif et l’utopie sociale libertaire au XXème siècle (wahlverwandtschaften), en Europe centrale.

Plus loin, l’auteur nous livre quelques pistes de recherche historiographiques.
La première, à partir du Moyen-âge, entre étique chevaleresque et doctrine de l’église. La seconde au XVIème ou, entre Kabale et alchimie. Et la troisième, entre conservatisme et esthétisme romantique au XIXème et au XXème ou, entre psychanalyse et marxisme ou encore, entre surréalisme et anarchie. Löwy essaie ensuite de comprendre pourquoi c’est principalement en Europe centrale, que s’est développée cette dernière connexion et non pas en Russie ni en Europe occidentale ? Est-ce dû à une meilleure intégration des Juifs en Allemagne et en Autriche ? Est-ce parce que la plupart des penseurs de l’intelligentsia de ces deux pays, anarchistes ou affiliés, étaient d’origine juive et en relation avec d’autres intellectuels, dits « romantiques, rebelles » et antiautoritaires allemands et autrichiens ? Serait-ce une des origines de la haine que vouaient les antisémites à ces penseurs, des plus religieux aux sionistes et des plus marxisants, aux anarchistes les plus radicaux ?

Mikael Löwy s’arrête longuement sur le cas ce chacun de ces individus, les replaçant dans leur contexte historique et sociologique :
Le premier groupe étudié est celui des « juifs religieux anarchisants ». C’est Martin Buber qui donne l’occasion à l’auteur de s’étendre sur « sa théorie du socialisme utopique, fondé sur son anthropologisme philosophique ». Mikael Löwy passe au cas Franz Rosenzweig et à sa vision du monde « passionnément romantique » et anticapitaliste. Puis sur Gershom Scholem et son « utopie messianique » ne se réclamant pas des théories sionistes, mais plutôt anarchistes. Nous verrons alors, comment Scholem et Buber, s’impliqueront ensuite dans la mouvance du rapprochement judéo-arabe.

Dans le chapitre suivant, Löwy nous offre un petit voyage parmi les membres actifs des Conseils ouvriers de Munich et Budapest de 1919 : les Allemands, Gustav Landaeur, Kurt Einer, Eugène Leviné, Ernst Töller, Erich Müsham [note] et Giörgi Lukacs en Hongrie. L’auteur tente en premier lieu, de définir le tronc commun entre les idéologues allemands cités plus haut. Il y reviendra dans un autre chapitre, sur chacun d’eux. Un long passage est ensuite consacré à Franz Kafka, cet « outsider » dont l’originalité, selon Löwy « se situe dans le caractère strictement négatif que prennent aussi bien dans son œuvre, le messianisme juif (theologia négativa) et l’utopie libertaire qui n’apparaissent qu’en creux ». Les œuvres de Kafka sont alors soigneusement passées au peigne fin, révélant, entre autres, son hostilité au progrès industriel-capitaliste, sa révolte contre la famille (Lettre au père – déjà longuement abordée dans une précédente rubrique) et « l’atmosphère étrange de religiosité qui imprègne ses romans inachevés ». A noter que Mikael Löwy détaille ensuite longuement la période anarchiste de Kafka, dans les années 1909/1912. Pour l’auteur, les conclusions qu’en tire Kafka « seront fusionnées dans ses œuvres sous la forme inversée "d’un anarchisme métaphysique" » que Löwy va s’empresser de nous détailler.

L’auteur s’attaque ensuite Walter Benjamin « philosophe à l’écart de tous les courants, mais à la croisée de tous les chemins ». L’auteur va nous expliquer en quoi Benjamin concentre toutes les contradictions politiques et culturelles de la Mitteleuropa, cherchant sa voie « entre ses tournants et renversements inattendus, fuites en avant et sauts en arrière ». Essayant de constituer sa pensée entre théologie et matérialisme historique. Entre assimilation juive et sionisme. Entre romantisme conservateur et révolution nihiliste. Entre messianisme mystique et utopie profane ! Bref, pas de quoi s’ennuyer ici non plus ! Passage très intéressant consacré à l’interprétation des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire s’articulant en gros, autour de la notion de progrès contre le paradis perdu.

Suit une analyse poussée des « intellectuels Juifs athées religieux libertaires ». Dans un premier temps, Mikael Löwy décortique le parcours intellectuel du premier d’entre eux : Gustav Landauer, le « plus anarchiste de tous les romantiques révolutionnaires ». Ami de Martin Buber et de Pierre Kropotkine. Il nous raconte son parcours, de sa participation à la République des Conseil de Bavière en 1919, jusqu’à son arrestation et son assassinat par les Gardes blancs.
Nous passons au second personnage de cette catégorie : Ernst Bloch, ce « théologien de la révolution et de l’espérance ». Ami du hongrois György Lukacs et de Walter Benjamin. Löwy nous explique comment dans la première partie de sa vie, Landauer développa son « utopie marxiste-libertaire, arnarco-bolchévique, en termes chargés de religiosité ». Et son attitude complexe et nuancée envers le judaïsme et le sionisme.
Nous faisons ensuite la connaissance de l’ami hongrois de Landauer, György Lukacs. Adepte d’Ernst Bloch, lui aussi passionné par le romantisme et la pensée mystique (plutôt chrétienne que juive). Cependant anti-étatiste convaincu, il traitait l’Etat de « tuberculose organisée ». Mikael Löwy va tout nous expliquer sur ce dernier, jusqu’à son adhésion au PC hongrois en 1918. Enfin le dernier des quatre, Erich Fromm est surtout connu par ses travaux publiés en Amérique à partir des années 40. Autant du fait de son essai de synthèse sur « les convergences possibles entre marxisme et psychanalyse et leur tronc commun messianique juif (Talmud et Ancien testament) ». Löwy nous entraine dans une petite digression passionnante pour comparer « l’évolution du christianisme après le IIIe siècle et le communisme après la mort de Lénine ». Pour en terminer avec Fromm, ce dernier se tournera pour finir, vers une lecture humaniste socialiste du prophétisme biblique.

Dans le chapitre suivant, Mikael Löwy examine en détail quelques cercles et courants littéraires, politiques et religieux d’Europe centrale. Tout au moins, ceux pouvant se référer à « l’émergence de l’affinité élective entre utopie et messianisme ». Comme la revue Der Jude des juifs anarchisants, Hans Kohn et Rudolf Kayser). Petit arrêt sur les idées de Buber et Landaeur « qui ont influencées les mouvements de jeunesse socialiste-sioniste ». Ainsi : La Jeune garde de Manes Sperber « non sans convergences entre anarchistes, communistes et socialismes ». Ensuite, Löwy nous parle des poètes et écrivains juifs qui participèrent au mouvement expressionniste. Notamment Ernet Toller, qui bien que se revendiquant « juif-allemand » et non-violent, participa lui aussi activement à la République des Conseils, puis soutiendra les enfants des antifascistes espagnols, avant de se suicider, exilé et chômeur à New-York. Un épisode tragique dont Klaus Mann, son ami, nous parle longuement dans ses journaux intimes.

Mikael Löwy nous présente ensuite, tour à tour, le jeune « anarchiste-métaphysique », Erich Unger. Puis, Erich Müsham dont son très émouvant journal de prison a déjà été évoqué dans une précédente rubrique du Rat noir. Stephan Grossman, ces trois derniers étant des proches de Landaeur. Au tour ensuite des anarcho-syndicalistes hongrois : Ervin Szabo, Bela Balasz, etc. Puis aux quelques militants socio-démocrates allemands refusant l’identité juive et le rationalisme progressiste : Victor Adler, Julius Deutsch, etc. Enfin, les communistes d’Europe centrale de la première période (1918/23), dont les spartakistes Rosa Luxembourg, Karl Liebknecht et Eugène Leviné, farouches antimilitaristes juifs-allemands durant la guerre de 14 et fusillés après la Révolution allemande pour « crime de haute trahison ».

Le dernier chapitre est consacré à Bernard Lazare « l’exception française » ! Un des rares, sinon le seul intellectuel marginal juif en France, se rapportant aux conceptions des Juifs d’Europe centrale, étudiés plus avant. Lazare était un proche de Jean Grave, d’Elisée Reclus, de Mikael Bakounine et Piotr Kropotkine. Proche également du mouvement symboliste « anticapitaliste romantique, anarcho-syndicaliste », Lazare fut un des pionniers de la campagne de défense de Dreyfus (se battant même en duel à ce propos contre Drumont !). Il fut forcé d’émigrer en Belgique à cause de ses idées. Ce parcours le conduisant finalement au sionisme athée (ou, « le retour aux racines ») …

En conclusion, Mikael Löwy nous explique « sa démarche ouverte » en ce qui concerne l’ensemble de ces penseurs juifs. Il nous expose ensuite, leur vision du monde et de certaines de leurs valeurs et principes, hérités de la philosophie des Lumières et du romantisme « comme agent d’un bouleversement révolutionnaire de l’ordre social ». Et ceci, ajoute l’auteur « de Spartakus à la Révolution française, de 1848 à La Commune de Paris et l’insurrection allemande de 1919, à travers une perception juive messianique de la temporalité et la nouveauté utopique et révolutionnaire active ».
Rien que ça ! Passionnant, en tous points.

Yves Bichet : Le Premier combat




Yves Bichet est un écrivain français, poète, romancier et dramaturge, né en 1951 à Bourgoin-Jallieu. Originaire d’une région très particulière du Dauphiné, salarié agricole pendant neuf ans, puis artisan du bâtiment, il se consacre ensuite totalement, à l’écriture.




Dès les premières pages du Premier combat (éd. Le Pommier) nous tombons sous le charme de « l’Ennuye ». « Une rivière qui porte mal son nom puisqu’elle ne s’ennuie jamais en descendant des montagnes, et arrive capricieuse dans le petit village de Foncouvert, encaissé dans les contreforts de la basse-Ardèche. Où le temps est réduit à l’essentiel, où il n’y a rien d’autre à glaner en ces lieux que les gestes et leur répétition tranquille. Plus loin, très loin, il y a aussi les cheminées de la centrale de La Baume qui crachent leurs panaches lactescents, fumées industrielles qui ne font plus vraiment peur. Les hommes d’ici aiment regarder autour d’eux. Ils ne sont ni naïfs, ni passéistes, ni donneurs de leçons, ni des bobos venus des métropoles, ni décroissants, ni relanceurs de l’économie. Ils savent réfléchir. Ils aiment les oiseaux autant que ceux qui parfois les chassent. Ils sont simplement attentifs, laborieux, ordinaires ». Voilà pour le cadre.
Les principaux protagonistes, à présent. D’abord, Corentin, l’instituteur de l’école primaire à classe unique. Tous âges confondus, il accueille les enfants des paysans, artisans, commerçants, écolos ou climato-sceptiques, ou chasseurs. Ensuite, Zuita, sa compagne, « dirigeante volontaire » du club équestre et Liseron, sa fille adolescente, surnommée par les autres gamins : « la boiteuse ». Il y a aussi Robert Savajol « le gentil idiot et mascotte du village ». Myriam l’infirmière, qui « dirige le conseil municipal pratiquement en auto-gestion ». En marge, se situe Emir Germain, au passé difficilement résumable… Mais, clandestin guinéen sans papiers, « pas bégueule, poli et très attentionné ».

C’est dans ce cadre que devrait se dérouler « une vie plutôt paisible, presque douce loin du monde des agités, petit paradis avec ses qualités et ses défauts ». Jusqu’au jour où tout va brusquement basculer et tomber dans une spirale effrayante. Comment se sortir d’une conjoncture devenue tout à coup plus que défavorable ? Lutter contre la machine administrative qui broie tout sur son passage ? Accepter ou réagir ? Mais réagir, est-ce encore possible et seulement imaginable dans une société policée et régie par les lois des plus forts ? A moins qu’en cette année d’élection, l’impossible soit encore possible ! A moins qu’une poignée d’enfants, d’ados et quelques adultes déterminés, décident « de voir et de faire voir le monde autrement » !
Dédicace d’Yves Bichet aux lecteurs du Rat noir : « Ce premier combat, contestable, mais peut-être salutaire, avec une poignée d’adolescents aux manettes, l’amour qui guette comme de juste et la folie des hommes en embuscade. Bonne lecture. » Et elle fut bonne. Merci à Yves Bichet !

Lawrence Aragon : Irish Draft



Irish Draft (éd. Publishroom) met en scène Lawrence. 46 ans, divorcé, cardiologue à Paris.
Un soir, il appelle Kate, sa nouvelle petite amie irlandaise. Celle-ci est éleveuse de chevaux et vit avec un homme machiste et violent, duquel elle a eu une fille (qu’il n’a pas reconnue). Tandis que Kate s’occupe de ses chevaux, elle raconte sa journée harassante à Lawrence. Tout-à-coup, « une voix virile et autoritaire coupe court à nos échanges bien innocents ». Evidemment : c’est le « compagnon » (sic) mais surtout, patron de Kate qui « certainement par jalousie et colère lance un premier coup à la jeune femme. Elle crie de douleur et de panique et derrière, [Lawrence] entend la voix d’une petite fille effrayée qui crie "Mummy, MU-MY". Et puis : plus rien ». Comment Lawrence peut-il réagir à plusieurs centaines de kilomètres ? Comment ne pas céder à la panique ? Doit-il appeler au secours, la police irlandaise ?
Et si tout cela n’était que le début d’un grand cauchemar ? Lawrence reprend alors pour nous, toute l’histoire à zéro. A partir du moment où, alors que fana des chevaux, il recherchait à acquérir l’Irish Draft de ses rêves. Et c’est à partir de là que sa vie a basculé !
Ces allers et retours dans le passé vont nous permettre de découvrir les deux aspects du talent narratif de Lawrence. Celui de l’urgence et l’autre, plus romantique et naturaliste.
Ce dernier va nous faire voyager tour-à-tour, dans le charme de l’île de Bréhat, mais aussi au milieu du quotidien de la vie irlandaise « où tout se sait, surtout ce qui ne vous concerne pas ! ». Les paysages stupéfiants de l’île verte et surtout les débuts idylliques d’une belle histoire d’amour.
Mais plus nous allons avancer dans cette histoire vécue, plus nous allons plonger dans la lutte de Titan que va devoir mener notre cardiologue, pour sortir Kate des griffes de son Gil de Ray. Sans rien nous épargner des galères et rebondissements incessants, cauchemardesques. Des larmes et des montées d’adrénaline, un enlèvement salvateur « à l’ancienne », une bataille épuisante contre les institutions « trop lentes à réagir ». Avec toutefois, de belles rencontre au passage : amis, collègues et psys compétents, etc. Mais au bout du compte, après tout ce que nous allons traverser en leur compagnie, Kate et Lawrence finiront-ils par connaitre une « happy end » ?
« Lorsqu’une femme est victime d’abus et de violences, les chances de s’en sortir sont maigres, tout comme la force de combattre ses démons et traumatisme ? En plus d’être battue et violée, on te méprise et on te dépouille », nous confie Lawrence. « Pour une femme qui s’en sort, combien y restent ? ».
Et sans compter la lenteur de la justice, soulignent encore dans l’épilogue, Lawrence Aragon et Patrick Schindler, le préfacier de ce roman hyperréaliste. Roman autobiographique qui a le grand avantage de démontrer que décidemment, aucun milieu social ni aucun pays, n’échappent au machisme meurtrier de « la loi du plus fort » !

Patrick Schindler, individuel FA, Athènes


PAR : Patrick Schindler
individuel FA, Athènes
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le 13 novembre 2023 16:13:26 par Le Rat noir

Kaliméra,

Le Rat noir a reçu ce mail d’un lecteur au sujet de la recension du livre de Mikael Löwy :

Au Rat noir,

Juste quelques petites réflexions :

Tout d’abord, il me semble qu’à un moment, Landauer a pris la place de Erst Bloch... Les lecteurs du livre replaceront bien évidemment les choses en leur place ...
Ensuite, je suis quelque peu en désaccord : Luxembourg , Liebnecht et autres de "farouches antimilitaristes juifs-allemands" me semble pour le moins aventureux. Le fait d’avoir voté contre les crédits militaires ou s’être opposé au pouvoir prussien n’en fait pas de antimilitaristes pour autant, juste des militants révolutionnaires pragmatiques.

Pour Löwy, je n’ai pas lu son livre. J’ai donc lu ta recension et ai trouvé que Löwy qui s’est fait une spécialité de ce moment et endroit de l’histoire européenne embrassait trop de choses. J’ai trouvé il y a longtemps qu’il avait une certaine sympathie pour le courant juif pour le retour à un vrai judaïsme en Mittel Europa, ce qui a donné toute cette série d’intégristes juifs originaires de cette Europe, mouvement qui se passe au moment où le courant assimilationniste juif était en force donnant naissance au Bund, et aux anarchistes juifs athées.

Quand à Landauer, ses relations avec le judaïsme étaient pour le moins particulières, elles sont presque tout le temps vues à travers les lunettes de Buber.
Je m’étais exprimé à ce propos dans un long texte paru dans A contretemps ( Questionnements sur « Juifs et anarchistes » - [A Contretemps, Bulletin bibliographique] ) où je reprenais entre autre, cette citation :" Landauer jugeait ces réunions fructueuses ( cercles sionistes ), tout en étant opposé aux sionistes : il ne pouvait se représenter un judaïsme vivant que dans la Diaspora, et ni en Palestine ni dans un État juif il ne voyait de moment utopique".

Je me dois de rajouter qu’aujourd’hui, nous vivons une période contre-révolutionnaire qui ne semble, hélas, pas tellement intéresser nombre d’anars et c’est bien regrettable...

Amitiés

Pierre S. lecteur du Rat noir

2

le 14 novembre 2023 14:31:28 par Anne-Laure B. éd. Signes et Balises

Merci beaucoup, cher Patrick!
J’apprécie spécialement ta dernière phrase à la fin de ta recension de Sonderkommando ( sur la force du témoignage ).
Juste deux petites précisions cependant :
- Pierrette Turlais ( des éditions Artulis ) prend deux "r"...
- Et, la partie évoquant la langue de Marcel Nadjary n’est pas de Tal Bruttmann mais de Loïc Marcou ( qui est également le traducteur de Nadjary qui écrivait en grec... )
Merci beaucoup et j’espère à bientôt à Athènes !

3

le 14 novembre 2023 14:33:03 par Barbara Pascarel

Cher Patrick,
Bravo pour cette recension du livre de Mikael Löwy, pas forcément facile... et pour les autres conseils du Rat noir, qui donnent toujours des envies de lecture.

4

le 14 novembre 2023 14:37:49 par Sylvain Desmille

Joyeux anniversaire au Rat noir !
bises, Sylvain

5

le 14 novembre 2023 14:39:59 par Stéphane Sangral

Schelling, Shakespeare, etc. : le Rat noir a toujours bien su s’entourer ! Quel réseau !!!
Fonte brute a l’air bien intéressant...
Merci !