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par Sylvain Boulouque le 12 novembre 2023

PAGES D’HISTOIRE N°40

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Un œillet rouge avait fleuri au Portugal

Il y a quelques décennies Georges Moustaki dans Portugal chantait que les événements récents dans ce pays permettaient de reprendre espoir. Quelques mois avant l’anniversaire de la révolution des œillets, l’historien Victor Pereira et le dessinateur et scénariste Mathieu Sapin, chacun à leur manière sur cet événement.
Cette bande dessinée avec le trait naïf qui caractérise son auteur, retrace sur l’itinéraire de son beau-père, Edgar, devenu dans les années 1960 jeune militant maoïsant du Front d’action révolutionnaire sous l’influence de son professeur de géographie. Clandestin dans le Portugal de Salazar puis d’Américo Tomas, infesté par les agents de la PIDE (Police internationale de défense de l’État), qui épaule la police de choc qui réprime violemment les manifestants, Edgar participe aux actions dénonçant la dictature.





Edgar doit les contourner pour pouvoir militer pour ce faire il bénéficie d’un emploi particulier, livreur ce qui lui permet d’agir clandestinement. Dans un deuxième temps, il part à l’armée où il tente de provoquer une insurrection quelques années avant le soulèvement organisé par le mouvement des forces armées en avril 1974. Menacé d’arrestation, il fuit le Portugal et arrive en France, où le jeune émigré devient même l’objet d’une émission de Pierre Lazareff. Rocambolesque, Edgard tente de se rendre en URSS bloqué à la frontière tchèque par des douaniers et le StB, la sécurité d’État. Il rentre en France, participe aux groupes maoïstes portugais en exil, avant de pouvoir rejoindre le Portugal en 1974. Sans rien renier ou presque de ses convictions.




Victor Pereira dans une synthèse explique la transformation du Portugal des années 1970. Il rappelle la naissance et le développement de la dictature fascisante de Salazar et de son successeur, Marcelo Caetano. Il souligne comment le Portugal se maintenait par la force dans ses colonies (Angola, Mozambique, Cap Vert, etc.). Une partie de l’armée propose une solution négociée, mais Caetano refuse. Parmi les jeunes militaires acceptant d’effectuer leur service – le Portugal comptait alors près de 20 % de déserteurs – certains forment le Mouvement des forces armées qui prône à la fois la décolonisation et la démocratisation du Portugal. Parallèlement, les conditions économiques particulièrement difficiles pour les Portugais entraînent des mouvements sociaux d’importance. Le 25 avril à minuit, les militaires se soulèvent pour renverser le pouvoir. En une nuit, le Mouvement des forces armées conduit par Otelo De Carvalho renverse le pouvoir. La population descend dans la rue et commence à occuper les lieux de pouvoir et à partager les richesses. Des scènes de fraternisation avec les militaires ont lieu, symbolisées par les œillets rouges. Une grève générale traverse le pays. S’en suit une période de tension qui dure jusqu’en 1976, entre révolution sociale, expérience autogestionnaire, institution d’un système parlementaire et tentative de contre-révolution fasciste (1). Les partis politiques léninistes – maoïstes et orthodoxes – tentent d’imposer leur vue alors que parallèlement les socialistes essayent de doter le Portugal d’une constitution. Face aux menaces de guerre civile, une majorité des MFA opte pour la consolidation d’un système démocratique. C’est en quelque sorte la fin de l’expérience portugaise, bien mis en perspective dans ce livre.

(1) Voir les livres de Charles Reeve parus chez Spartacus à ce sujet.

Edgar
Mathieu Sapin
Dargaud 2023 160 p. 24 €

C’est le peuple qui commande
La révolution des Œillets 1974-1976

Victor Pereira
éditions du détour 2023 276 p. 21,90 €
PAR : Sylvain Boulouque
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