éditorial du n°1240
Ils sont cinq millions à être ainsi couvert par ce que l'on appelait « la sécu pour tous ». L'État en avait prévu six millions, et s'interroge : Peut-être n'y a-t-il pas eu assez d'informations ? Peut-être est-ce un peu tôt ?
Oui, peut-être devrions nous aussi nous demander quels sont les exclus d'un tel système, notamment tous ceux qui ne disposent pas d'une adresse fixe. Car pour avoir le droit à la CMU, il faut remplir un dossier, et disposer de toutes les pièces adéquates, pour qu'après on puisse disposer de nous. Un sans papier ne risque pas d'y avoir droit.
Peut-être aussi devrions nous nous demander si la gauche peut vraiment être fière de ces chiffres. Elle se gargarise de la réussite du projet, que chacun enfin ait le droit à la santé. Mais le droit à la santé, ce n'est pas dépendre de l'aide sociale. Ce que montre ces chiffres, c'est qu'il y a cinq millions d'individus, au moins, car ils sont sans doute beaucoup plus, qui n'ont pas les moyens d'accéder aux services de santé parce qu'ils gagnent une misère chaque mois.
En même temps que l'on nous présente ces nouveaux chiffres de la misère en France comme une réussite, les sages-femmes sont en grève. Il y a peu de temps, c'était les anesthésistes, et avant les puéricultrices... Les services hospitaliers manquent cruellement de personnel et de matériel, et sont plus que surchargés.
La santé pour tous, mais quelle santé ? C'est aussi la gauche qui ferme des maternités, des hôpitaux de proximité... Pour accéder aux soins, encore faut-il qu'ils existent. De plus en plus, l'État délègue aux privés les aspects rentables de la santé, et laisse aux hôpitaux ce qui ne rapporte pas. Alors la CMU, c'est bien gentil, mais, de plus en plus, cela voudra dire santé à deux vitesses. Pour ceux qui pourront payer, un service de qualité privé, et pour les autres, ce qui restera de la santé publique quand le démantèlement sera terminé.