éditorial du n°1196
Le développement de ces préoccupations traduit certes la volonté patronale de préserver la sécurité des entreprises contre les agissements opportunistes et la corruption. Mais surtout, face à une exploitation accrue des plus faibles le capitalisme se doit de répondre aux critiques afin d'éviter une remise en cause radicale ou à défaut une démobilisation générale de la population. Autrement dit, l'avenir du marché est à l'exploitation soft des travailleurs et de l'environnement afin d'écarter toute tentative de boycott d'une marque de la part du consommateur.
La mise en œuvre de règles éthiques fait aussi intervenir l'autonomie et la responsabilité des personnes, ce qui n'est pas pour nous déplaire. Mais, à l'heure du démantèlement des solidarités ouvrières et où l'organisation en réseau des activités économiques isole davantage les personnes, cela revient à transférer sur l'individu toute la pression inhérente à la décision de ne pas faire le sale boulot que lui ordonne le patron. Pas de panique : des cours d'éthique, pratiqués déjà dans l'enseignement supérieur, sont là pour nous apprendre à dire non.
Face à cette supercherie qui s'opère avec le recours à l'éthique comme moyen de réduire les inégalités et de nous faire intérioriser les contraintes et la domination capitalistes, nous devons être en mesure de faire émerger des luttes collectives en rupture avec le système. Sinon, la critique ne profite qu'au capitalisme qui, en l'intégrant, rebondit à nouveau. Et ce petit jeu peut continuer longtemps.