éditorial du n°789
Vous avez dit Reichstag ?
Monsieur Germon a-t-il été empalé, ou a-t-il seulement été exhumé, affublé d'une étoile jaune et suspendu le long d'un parasol ? L'exquise question déchaîne des tempêtes, et présente effectivement un intérêt : celui de voir fonctionner le révisionnisme au quotidien, presqu'en temps réel.
Que s'est-il passé à Carpentras au cours du joli mois de mai ? Rien, ou si peu, selon les informations de Minute. Les Juifs n'ont jamais existé et la connerie non plus.
Bien plus sérieusement, la presse écrite, la radio, la télévision disséquent, sans nous épargner aucun détail, les propos de Mme le procureur de Carpentras. Nauseuse précision qui rapelle d'autres pénibles souvenirs : ceux des articles qui, en décembre 1986, avaient longuement disserté sur l'éventuelle incidence de coups de matraques sur le décès d'un jeune homme en sang, gisant sur le trottoir de la rue Monsieur-le-Prince...
Les mêmes journaux n'ont guère crié au scandale, lorsqu'un glorieux jugement acquitta les assassins.
À force de se vouloir sensationnelle, il arrive à la presse de devenir irrationnelle. Les hyènes fascisantes ont alors beau jeu de hurler à la désinformation et à la manipulation. Intox ? Non, révisionnisme en temps réel. « Carpentras connais pas ! » relève exactement du processus qui conduisit nostalgiques du nazisme et égarés de l'ultra-gauche à nier le génocide. Et pour remonter de quelques années dans l'Histoire encore proche, souvenons-nous de l'incendie du Reichstag. cet incendie perpétré par les nazis, attribué aux communistes, qui valut à un simple d'esprit d'être exécuté. Nombre d'historiens travaillèrent une quarantaine d'années, avant que la vérité soit rétablie, et le malheureux réhabilité post-mortem. Nous respectons leur travail, mais l'essentiel était-il là ? L'intox de l'époque constitua la victoire symbolique dont Hitler avait besoin pour prendre le pouvoir. Nous n'affirmons pas, nous, que le Reichstag se trouve à Carpentras ni même que Le Pen égale Hitler. Mais comme nous aimerions pouvoir croire que le fascisme, en France, n'a jamais existé...