éditorial du n°1693
mis en ligne le 16 janvier 2013
L’année commence très bien. À preuve ces révélations datées du lundi 7 janvier, par notre confrère Daniel Schneidermann, bien timidement relayées par le Washington Post, un journal de France 2 et L’Humanité – bien sûr, les autres, les télés, tabloïdes, les médias à la solde n’en ont pipé mot. En effet, une fracassante nouvelle circule dans les salles de rédaction bien informées, celles qui se préoccupent davantage de l’avenir de notre planète que des frasques russophiles de Depardieu ou des exigences éléphantesques de Brigitte Bardot. Attention, on se tient bien, ça vaut son pesant de nougat : deux économistes du sacro-saint FMI, Olivier Blanchard et Daniel Leigh, pour ne point les nommer, ont révélé dans un très sérieux et très officiel document de 44 pages que les « experts économiques », et à leur suite les dirigeants politiques du monde entier « se sont trompés en imposant, au nom de la science, l’austérité à toute l’Europe ». Le FMI se serait planté dans ses prédictions du fait d’un « mauvais coefficient de calcul » malencontreusement introduit dans son logiciel à lire l’avenir ce qui lui a fait « sous-estimer l’impact négatif des politiques d’austérité sur la croissance ». Ce regrettable bug l’aurait empêché de réaliser que « l’austérité assèche la demande », et tue du même coup dans l’œuf toute velléité de croissance économique. Ce que quelques « dissidents » de la doxa néolibérale en vogue, comme Paul Krugman, s’entêtent à répéter : « En économie, mes dépenses sont tes revenus, et mes revenus sont tes dépenses. » Ce que tout élève de CM2 est capable de comprendre, pourrait-on ajouter. Il aura fallu qu’un expert se lâche pour qu’enfin – à contre-courant des sempiternels et absurdes titatas – quelqu’un ose dire que « le roi est nu » et qu’en régime néolibéral l’austérité ne peut signifier que chômage, inégalités, misère, licenciements pour la majorité des gens. Pan dans l’œil des dévots du serrage de ceinture, des gouvernants peu ou prou élus d’Europe et d’ailleurs. Pan sur le bec de la Parisot, du Medef et des tenants de l’austérité, suintants de suffisance, qui, à tour de bras, délocalisent, flexibilisent, réduisent les voilures. Pan sur le nez des pervers sectataires de la crise, qui assoient leurs pouvoirs sur l’infantilisation des exploités. Pan dans le ventre des affameurs donneurs de leçons, des prédicateurs alarmistes aux cerveaux en forme de bourses, des licencieurs professionnels pourris de bonne conscience, des experts autoproclamés en malheur, des agences de notation autoréalisatrices, des prédicateurs de tout poil et de leurs gurus. Pan dans la trogne des adorateurs d’équilibre budgétaire et de leurs bêlantes dupes.