Luttes syndicales > Entretien avec la commune libre et autogéré de Caen (C.L.A.C)
Luttes syndicales
par Ramu le 12 avril 2023

Entretien avec la commune libre et autogéré de Caen (C.L.A.C)

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Depuis presque un mois des étudiant.e.s de l’université de Caen ont pris d’assaut, non pas le ciel, mais un bâtiment du campus 1 dédié initialement aux cours de droit. Les étudiant.e.s et militant.e.s s’inscrivent donc dans le mouvement social par cette occupation et décident de transformer ce sinistre bâtiment en jolie expérience autogestionnaire et autonome.




Pourquoi avoir décidé d’occuper un bâtiment et est ce qu’il y a, au-delà de la question des retraites, des revendications propres au mouvement étudiant ?
L’envie commune d’occuper un bâtiment a été voté en AG 2-3 semaines avant les vacances de février. On s’y est pris à 5 en fin de journée en barricadant les portes de l’intérieur et ça va faire maintenant une semaine [note] qu’on est dans ce bâtiment.
Le lendemain matin on a bloqué la fac, ce qui a conduit à une fermeture administrative de la part de l’université. Nous avons, en effet des revendications concernant les étudiant.e.s, avec le collectif Fac en lutte, nos revendications portent surtout contre la réforme des retraites mais aussi de l’arrêt de l’augmentation des frais d’inscription, pour de meilleurs conditions d’étude, contre la privatisation de l’université, la fin des critères de bourse qui ne font que diminuer et l’état des cité U qui sont désastreux. L’université via la privatisation se transforme de plus en plus en pole d’excellence ce qui provoque de la sélection dès l’entrée et des difficultés aussi (suite à la loi LPPR [note] ) de faire une thèse et de mener quelconque recherche critique.

Comment réagit la présidence par rapport à cette occupation ?

Il y a eu une dispense d’assiduité accordée pour les journées du 6,7,8 mars qui était bien dû au rendez-vous qu’on a eu avec la présidence. Sinon la présidence réagit mal à cette occupation encore plus depuis qu’un agent de sécurité à taper un de nos camarades. Ils envoient pas mal aux autres étudiants et personnelles des mails nous discréditant en disant notamment qu’on ne respecte pas la sécurité du lieu et que les tags sur les bâtiments ne parlent pas de la réforme des retraites. Sur ce lieu d’occupation on discute politique, on se forme et on débat entre nous tout le temps donc c’est normal qu’on aille plus loin dans les revendications que juste la question des retraites. Pour qu’une lutte soit efficace il faut qu’elle s’élargisse et qu’elle aille plus loin qu’une simple question de réforme.
La présidence a aussi annoncé qu’il y aura une expulsion, on ne savait pas quand exactement donc il y a eu un petit moment de panique mais il s’est dessiné trois scénarios possibles, soit on a les keufs qui viennent nous expulser, donc on a commencé à s’organiser en cas de potentielle expulsion en s’organisant aussi avec d’autres personnes pas à l’aise avec la conflictualité de pouvoir sortir avant du bâtiment en étant exfiltré, on a aussi formé les militant.e.s qui faisaient leur premier mouvement social par rapport aux réflexes à avoir contre la répression policière et judiciaire. Le deuxième scénario, c’est qu’on allait pouvoir rester dans le bâtiment mais dans ce cas-là on allait devoir faire face à des étudiant.e.s anti-blocage et le troisième et dernier scénario possible c’est qu’on allait se faire attaquer par des fafs [note] . Concernant le troisième cas il fallait qu’on commence à se préparer pour se défendre physiquement. Au final c’est le deuxième scénario qui a gagné, on est toujours dans le bâtiment mais si il y a une expulsion on est prêt.e.s à tenir l’occupation jusqu’au bout !




(lettre ouverte des étudiant.e.s de la CLAC suite aux fausses accusation de la présidence de la fac de Caen)

Comment vous vous organisez dans le bâtiment?
Globalement c’est l’autogestion. Les grandes décisions sont prises en assemblées générales, même si ça prend du temps et que c’est souvent laborieux. Souvent il y a de longs débats entre des étudiant avec un positionnement plus réformiste qui ne participent pas à l’organisation du lieu et des radicaux qui s’organisent pour maintenir le lieu commun tout en participant aux blocages économiques sur les rocades et aux manifestations les après-midis. Il y a des conférences et des débats qui sont organisés régulièrement. Des occupant.e.s on fait un apériodique de la commune. Ensuite il y a différentes commissions qui s’organisent selon les différentes tâches à faire (cuisine, actions, communication, etc…) Les camarades primo-manifestant.e.s ont appris à faire des barricades en peu de temps et à comment faire des chaînes pour s’enfuir donc il s’agit aussi d’un lieu où on se forme manuellement !







Comment est perçue l’occupation par les autres étudiant.e.s ?

Les étudiant.e.s des autres campus sont plus éloignés et donc ne sont pas forcément informer sinon les étudiant.e.s qui passent devant et voient ce qu’il se passe sont assez hostiles, surtout les étudiant.e.s en droit vu qu’on occupe un de leur bâtiment. Sinon on informe pas mal les autres étudiant.e.s de pourquoi on occupe le bâtiment en diffusant des tracts sur le campus, on communique aussi via les réseaux et on communique aussi avec plusieurs villes (on est malheureusement trop peu en effectif pour aller à l’interfac qui a lieu ce weekend à Paris)




Comment se fait le pont entre les différents secteurs en grève ?
Il est important de préciser que ce n’est pas juste une occupation étudiante mais ouvert a tous.te.s. Le but de cette occupation est de faire de ce lieu un foyer de contestation pour permettre à des individu.e.s/collectifs/groupes de s’organiser librement. On accueille les AG de l’Éducation nationale, les AG intersectorielles et des AG lycéennes. Ça permet de faire rencontrer sur un même endroit différentes personnes qui luttent. Il n’y a pas que des étudiant.e.s qui s’occupent du lieu mais aussi des camarades qui viennent filer des coups de main. La CLAC est une expérience autogestionnaire intéressante et on a souvent des personnes différentes qui viennent voir comment on s’organise.

Quels sont les futurs projets ?
On a l’idée de commencer à cultiver la terre et faire des jardins sauvages partout sur le campus (surtout sur l’immense pelouse toute verte qui sert à rien) ! Sinon plus sérieusement, pour lutter contre la précarité on est en lien avec des collectifs d’entraide populaire avec qui on fait des cantines. Partager un repas chaud permet de faire du lien et du commun entre nous et entre d’autres camarades que l’on ne connaissait pas. On a traversé toute une période d’isolement et donc il est important de manger ensemble, de parler et de discuter ensemble. On fait, au final, ce que la fac ne fait plus.





Propos recueillis par Ramu


PAR : Ramu
Groupe Germaine Berton
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