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par Daniel Pinós • le 5 juillet 2021
L’anarchisme et la République en Espagne (2e partie)
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Une « République sociale et libertaire » y a-t-elle déjà existé ?
Article extrait du Monde libertaire n°1827 d’avril 2021
La Seconde République
En 1931, la Seconde République fut proclamée en Espagne, ce qui suscita également un espoir pour les travailleurs ; mais, très vite, on s’aperçut que le nouveau régime n’était pas du tout révolutionnaire. Le mouvement libertaire lui-même ne reçut pas cette république avec enthousiasme, mais il ne la combattit pas non plus, son objectif était clair : l’amnistie des prisonniers politiques (parmi eux beaucoup d’anarchistes) et, pour paraphraser Buenaventura Durruti, mettre en place « un processus de socialisation démocratique ». De sorte que la république ne pouvait être considérée que comme un point de départ. Elle était issue d’une dictature, il était donc logique qu’elle réponde à certaines revendications des travailleurs que l’autoritarisme d’un régime réactionnaire avait ignorées ou réprimées.
En outre, d’autres questions sensibles, telles que la réforme militaire, le statut économique, la libéralisation de l’éducation ou la réforme agraire, faisaient l’objet de controverses et ne pouvaient ou ne voulaient pas être traitées par les nouveaux dirigeants, ce qui est immédiatement apparu à la classe ouvrière et la paysannerie. Pour elles, le nouveau régime républicain n’allait pas répondre à ses aspirations. Les revendications économiques et les troubles sociaux ne tardèrent pas, et le gouvernement républicain n’hésita pas à recourir à nouveau à la répression.
Les anarchistes et les anarcho-syndicalistes avaient accueilli la république avec réserve. En juin 1931, la Confédération nationale du travail (CNT) réunit à Madrid des centaines de délégués pour mettre en garde contre la nouvelle répression que le régime républicain serait tenté d’instrumentaliser.
En ce qui concerne la prétendue division du mouvement anarchiste, et plus particulièrement de la CNT, il faut rappeler que le Manifeste des Trente [note] , d’août 1931, signé par quelques personnalités prestigieuses comme Juan Peiró, ne cherchait pas la collaboration entre les classes et la participation à l’État. Il dénonçait l’aventure insurrectionnelle d’une minorité au sein de la CNT, mais il faisait une analyse lucide et sensible de la situation de la classe ouvrière et de la paysannerie.
Il n’y a pas eu de véritable division dans le mouvement anarchiste espagnol, les signataires du manifeste se sont opposés à la Fédération anarchiste ibérique (FAI) avec une certaine dose de réalisme, mais ils étaient tous de fermes opposants à l’État et ne pouvaient donc que prétendre renverser le nouveau système républicain.
Le massacre de Casas Viejas (province de Cadix), en janvier 1933,
Le comité national de la CNT a choisi les quatre noms destinés à cette mission : Federica Montseny, Juan García Oliver, Joan Peiró et Juan López. Avec ces quatre dirigeants, les deux principaux secteurs qui avaient lutté pour la suprématie dans le mouvement anarcho-syndicaliste pendant les années républicaines étaient représentés de manière équilibrée : les syndicalistes et la Fédération anarchiste ibérique (FAI). Joan Peiró et Juan López, ministres de l’Industrie et du Commerce, étaient les figures incontestées de ces syndicats d’opposition qui, après avoir été expulsés de la CNT en 1933, sont revenus au bercail peu avant le soulèvement militaire. Juan García Oliver, le nouveau ministre de la Justice, était le symbole de « l’homme d’action », de la « gymnastique révolutionnaire », de la stratégie insurrectionnelle contre la République, qui s’était érigée à partir des journées révolutionnaires de juillet 1936 à Barcelone. Federica Montseny, ministre de la Santé, était célèbre par son appartenance familiale. Elle était la fille du militant anarchiste, poète et écrivain Federico Urales. Elle était connue pour sa plume, qu’elle avait taillée pendant la République pour attaquer, à partir d’un anarchisme intransigeant, tous les traîtres réformistes. Elle fut également la première femme ministre de l’histoire de l’Espagne.
À suivre…
Daniel Pinós
1ère partie
PAR : Daniel Pinós
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