Sois libre et bats-toi

mis en ligne le 8 mars 2012
La CGT espagnole (anarcho-syndicaliste) a rappelé, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, une série de propositions déjà formulées auparavant mais qui prennent un caractère d’urgence dans la période actuelle. Avec les accords passés entre les syndicats institutionnels et les employeurs, la société espagnole s’enfonce un peu plus dans la précarité ; moins de contrats de travail à temps plein et donc plus à temps partiel, selon des critères définis par les patrons : économiques, de réorganisation, de compétitivité, etc.
Les femmes sont bien évidemment les plus touchées par les nouvelles « réformes », et de fait on retourne vers des schémas « traditionnels » de la société hispanique : la femme au foyer, ou à la rigueur travaillant à temps partiel et prenant en charge toutes les tâches domestiques. Il faut reconnaître qu’on n’était pas encore entièrement sortis de ce vieux schéma (et pas qu’en Espagne !), mais là, la marche arrière est embrayée. Toutes les coupes budgétaires dans le domaine public ont des conséquences directes sur la situation professionnelle des femmes : cantines scolaires, écoles maternelles, aide à domicile… Ce sont les femmes qui doivent abandonner leur travail, ou réduire leurs journées et accepter des emplois précaires en combinant l’ensemble.
Fermetures de centres d’assistance aux femmes battues, suspension des accords avec les cliniques privées en ce qui concerne les IVG. Que ce soit l’État ou les syndicats signataires de ces accords, rien ne va dans le sens de l’égalité femmes-hommes. Le gel des salaires ne devait concerner, selon le gouvernement, « que » 100 000 personnes, alors que rien que le travail à domicile en concerne 700 000 (dont 90 % de femmes), qui touchent pour la plupart le salaire minimum garanti (641 euros), et encore pas tous. Mais là aussi il y a inégalité : parmi ceux qui touchent moins que ce minimum, on compte 15 % de femmes, contre 5,6 % d’hommes. Les entreprises de nettoyage sous contrat avec les différentes administrations débordent de femmes travaillant à temps partiel et à qui, dans de nombreux cas, on doit plusieurs mois de salaire.
La situation économique provoquée par le système capitaliste tend donc à maintenir la femme sous dépendance de l’homme, avec ce que cela implique pour elle : moins d’autonomie, pas d’indépendance, retour au statut du modèle traditionnel familial, patriarcal, de soumission, sans parler des violences qu’elles subissent souvent.
La « loi d’égalité » est restée lettre morte (comme beaucoup d’autres lois), et dans de nombreuses entreprises, il n’est même pas possible de constituer la Commission d’égalité. Devant cet état de fait, nos camarades anarcho-syndicalistes espagnols impulsent régulièrement des campagnes de propagande sur l’égalité des sexes, le langage non sexiste et contre la violence machiste et patriarcale. Parmi leurs propositions : ouverture de négociations sur les mesures à prendre dans les entreprises pour atteindre une égalité effective entre hommes et femmes, mêmes revendications dans la rue et les quartiers pour reconnaître cette égalité, lutte contre le travail non déclaré que l’on peut constater dans le secteur des travailleuses à domicile, revendication des droits fondamentaux des femmes : « Notre corps est à nous, avortement libre et gratuit, lutte contre la violence machiste et patriarcale, droit à une orientation sexuelle libre et sans aucune discrimination. »
Le thème choisi par la CGT espagnole pour ce 8 mars 2012 est « Sois libre et lutte ». Il s’inscrit également dans le cadre de la célébration de la création en 1937 de Mujeres Libres, groupement de femmes anarchistes dont les idées, soixante-quinze ans après, sont toujours aussi actuelles, ce qui incite à réfléchir et à se demander si la société a réellement autant changé qu’on le pense ou qu’on veut nous le faire croire. Devant ce constat, la seule solution est la révolte massive et déterminée de toutes celles et ceux qui se battent pour que le mot égalité ait un sens.
Le 8 mars (et tous les autres jours), sois libre et lutte.


(d’après le mensuel Rojo y negro)