Chansons noires

mis en ligne le 17 décembre 2009
Après une longue gestation, Choléra, le dernier né de l’ami Mie, est là. Un truc pas vu à la télé qui ne plaira pas à toutes les oreilles.
Sur le livret de Dépareillé, son précédent album, éric Mie avait noté une citation de Francis Picabia : « Les gens sérieux ont une petite odeur de charogne. » Continuité dans le changement sur Choléra, son nouvel album, on retrouve Picabia qui nous dit cette fois : « Les hommes politiques poussent sur le fumier humain. » Ces deux pensées très pertinentes pourraient suffire à commenter le travail d’Éric Mie, un type plutôt marrant, plutôt anar.
Tellement anar que le premier titre de ce CD qui en compte quatorze c’est tout bonnement V’là l’choléra !, un texte de Louise Michel piqué dans un bouquin introuvable en librairie, à travers la vie et la mort, l’œuvre poétique de la Louise qui fut publiée en 1982 chez François Maspéro. Ce texte vous dira en partie quelque chose. Les punks des Sales Mômes en ont fait une version pimentée à la sauce grippe A… Sur une musique perso, Éric Mie reprend fidèlement les paroles originales, ce qui n’enlève rien à leur actualité. Ça en dirait même un rayon sur l’archaïsme de l’époque prétendument « moderne » que nous vivons…
Plus loin, le bougre aggrave son cas, en chantant Louise, un hommage à la « Vierge rouge » (qui n’était pas rouge et sans doute pas vierge) de la Commune. Une complainte qui se termine par « je rêve quand tu cries : tout pouvoir est maudit ! ». Mais là où l’animal risque d’être pris pour un dangereux ultra-anarcho-autonome, c’est avec le titre Mon Cancer généralisé. Avec ses 33 secondes bien pesées, cette chanson des plus courtes du monde doit être aussi l’une des plus détonantes. « Mon cancer généralisé / Et moi on va à l’Elysée / Avec humour je positive / J’ai une ceinture explosive. » C’est tout et ça suffit. « Vive le son de l’explosion », reprendraient en chœur les Anciens qui chantaient Dansons la Ravachole !
Éric Mie y va fort. Il tape sur l’onde moribonde (« Si tu veux mourir idiot / Ecoute bien ta radio… »), sur les salauds en tous genrs, sur « les riches qui nous baisent », sur la Nativité (en empruntant un texte à Jean Richepin). Ce qui n’est évidemment pas très vendeur à la veille de Noël. Que les cœurs tendres se rassurent, le chansonnier nancéen ne boude pas les douceurs quand il s’adresse à sa fille Célestine (née le 6 mai 2006).
Amour, humour, noir évidemment (à mort les gens qui meurent !), l’anarcomicotragik ne va pas beaucoup plaire aux libéraux ni même aux « socialistes » lorrains. On se souvient de ses mésaventures sur le site de Chambley Planet’Air cet été. Sans crier gare, les organisateurs lui avaient coupé le micro pendant qu’il chantait V’là l’choléra