« Le Parisien » dans les griffes du luxe ?

mis en ligne le 4 juin 2015

C'était la drôle de nouvelle de la fin mai pour les travailleurs du quotidien Le Parisien – Aujourd'hui en France : le journal devrait être racheté par... LVMH. Ainsi, Bernard Arnault, le grand bourgeois de l'industrie du luxe, s'intéresserait à la presse quotidienne populaire. À tel point qu'il serait prêt à débourser 50 millions d'euros pour racheter le tout, ou presque (puisque les murs, pour le coup, ça ne le branche pas, dit-on). Les grands industriels se rêvent décidément tous en patrons de presse... À noter que LVMH possède déjà Les Échos.
Bien sûr, le groupe Amaury – actuel propriétaire du Parisien – n'a, pour l'heure, pas indiqué si oui ou non il acceptait pareille offre. Mais personne n'est dupe. D'autant que cette annonce intervient au moment même où Amaury liquide l'imprimerie du canard et juste après une série de plans de restructuration chèrement payés par les salariés.
S'il ne revient pas à nous, travailleurs du Parisien, de choisir qui nous exploitera désormais, nous sommes tout de même en droit de nous inquiéter quant aux conséquences sociales de ce rachat quasi certain. Ce genre de petites transactions entre grands bourgeois s'accompagne souvent de casse sociale, et il est fort à parier que l'occasion sera ici saisie pour rogner sur les salaires, supprimer des emplois, revenir sur les accords, les conventions collectives et dynamiter quelques vieux statuts salariaux hérités des luttes ouvrières du passé (celui des ouvriers du Livre, par exemple).
Pas de grève pour l'instant dans la boutique, puisque rien n'est encore vraiment évident et que le flou le plus total règne rue Michelet, à Saint-Ouen, au siège du journal. Mais des assemblées générales se tiennent, et la vigilance est de mise. Vous trouverez ci-dessous la motion de l'assemblée générale du 28 mai dernier.

 

Motion de l'assemblée générale du 28 mai 2015

Nous, le personnel de l'UES de Saint-Ouen, toutes catégories confondues, réunis en assemblée générale jeudi 28 mai 2015 à l'appel de nos organisations syndicales FO, SNJ, SGLCE-CGT, SNJ-CGT, qui avons pris connaissance de la vente du Parisien dans un avenir proche, déclarons qu'il ne nous appartient pas de décider qui possède notre journal.
Alors que, depuis cinq ans, les salariés paient déjà le prix élevé des restructurations aux anciens et futurs actionnaires, nous déposons la plate-forme revendicative suivante :

– Aucune suppression d'emploi, tout départ (notamment par la clause de cession) doit être compensé par une embauche en CDI.
– Maintien des éditions papier, de leurs heures de bouclage habituelles et exceptionnelles, de leur pagination.
– Maintien de toutes les éditions départementales, de leur support papier, de leur pagination et de leur effectif.
– Maintien du Desk dans les effectifs actuels.
– Aucune remise en cause des accords collectifs, notamment celui régissant le temps de travail et l'édition du dimanche.
– Augmentation générale des salaires.
– Extension de la clause de cession à l'ensemble des catégories.
– Respect des conventions collectives.
– Garantie de l'indépendance éditoriale de nos titres.
– Maintien du potentiel industriel et de son personnel dans les imprimeries.
– Maintien du site de Saint-Ouen au-delà du bail en cours.
– Intégration du Parisien magazine dans Le Parisien.
– Garantie pour les salariés restant dans le groupe Amaury et travaillant en sous-traitance pour le groupe LVMH d'une reprise de leur contrat de travail et des avantages acquis en cas de rupture du contrat de sous-traitance.

Nous mandatons les organisations syndicales pour rencontrer le nouvel actionnaire dans les meilleurs délais.
Motion adoptée à l'unanimité moins 4 abstentions