Météo syndicale

mis en ligne le 12 juin 2014
Le cinéaste Ken Loach a déclaré récemment : « L’orage que prévoyait Jaurès se reproduit encore et encore. » Le tribun socialiste, pacifiste, fondateur de L’Humanité, mérite notre respect. Néanmoins, il faut se souvenir aussi qu’il fut un adversaire résolu du syndicalisme révolutionnaire qui animait la jeune CGT du début du siècle dernier. Particulièrement dans un article paru en 1901 dans le quotidien socialiste La Petite République 1. C’est d’une autre tenue que les sarcasmes divers des guédistes, mais la raison est la même : ce syndicalisme se posait en adversaire/concurrent des partis politiques.
Les idées force du syndicalisme ont peu à peu cédé le pas (et plus…) à d’autres, qui laissaient le premier rôle à la prise du pouvoir d’État au moyen de structures appropriées ! Aujourd’hui, le monde syndical attend, l’arme au pied, que les partis politiques définissent et finissent le boulot, à eux de déblayer le chemin… Comme quoi on peut faire du léninisme sans le savoir. ça grogne dans les rangs, mais les poches de résistance ressemblent trop souvent à des tranchées façon 14-18.
Pourtant, même le secrétaire actuel de la CFDT déclare que le temps des couleuvres est fini. Entendez par là que le patronat fait de la surenchère et que le gouvernement va au devant de ses désirs. Pourtant, comme il est dit dans les médias, les salaires des patrons sont toujours à la hausse. La CFDT a tenu son congrès la semaine dernière. Question contestation, tout semble verrouillé. L’annonce ex cathedra d’un ultimatum de la direction confédérale, qui assume ANI et pacte de responsabilité, renverrait les problèmes à la rentrée ? On espère que, lors de la conférence sociale programmée en juillet, ça ne va pas que grincer des dents, faudrait montrer les crocs et plus. Pour que chômage et précarité appartiennent enfin au passé.




1. L’article de Jean Jaurès est reproduit dans l’ouvrage Déposséder les possédants. La grève générale aux temps héroïques du syndicalisme révolutionnaire, textes rassemblés par Miguel Chueca, éditions Agone (pages 109 à 127). En vente à la librairie du Monde libertaire, 18 euros. Pour ajouter une question au florilège actuel autour de Jaurès : aurait-il apprécié qu’on « débaptise », après son assassinat, l’avenue et la station de métro Allemagne ? À Paris (XIXe arrondissement), l’intention première était anti-allemande, sûrement pas pacifiste !