L’autruche est sortie de son trou

mis en ligne le 8 janvier 2014
Pour bien commencer l’année, les Éditions libertaires nous gâtent. En effet, Quand l’autruche éternue, dix ans tête hors du trou, de Fredo Ladrisse vient de paraître. Ce petit volume d’une centaine de pages retrace dix années d’observation qui, toutes natures confondues, révèlent au quotidien la quintessence de la pensée profonde des hommes politiques, paraphilosophes, religieux, artistes, qui forment le socle commun, la clé de voûte de nos chères institutions !
Fredo a décidé de plonger dans les archives de sa chronique hebdomadaire, parue dans Le Monde libertaire, puis sur son blog, et ce pour notre plus grand plaisir. Le classement thématique et chronologique se compose de neuf parties. La première nous donne la vision éclairée de nos élites sur « Le monde merveilleux du travail ». On y croise des maîtres à penser, tels que Raffarin, le Baron de Sellière, Serge Dassault et autres Parisot qui, depuis 2003, redoublent d’effort pour nous faire comprendre que l’homme n’est fait que pour travailler et se taire ! Chaque citation est de taille délicieusement proportionnée selon le degré de son importance.
C’est un plaisir de redécouvrir, rassemblé dans le chapitre « Police partout, justice partouze », ce que, depuis 2003, la flopée de ministres de l’Intérieur et de leurs sbires (se succédant au gré des vagues de gauche et celles de droite), ont pu déverser comme propos haineux, poncifs iniques, racistes et populistes.
À ce sujet, il consternant de constater que Fredo a dû consacrer un chapitre entier, « Un Rom ça va disent-ils », aux gens du voyage qui, on le verra, ont été au cœur de l’exclusion durant la décennie entière. Le chapitre « Élections, piège abscons » rassemble les fantasmes les plus hardis et les plus fantasques des divers candidats. Tout comme le suivant, « Vivement le grand soir qu’on se couche », qui porte bien son titre. En effet, après avoir lu les inepties balancées par nos hommes politiques, on n’éprouve plus aucune honte à s’abstenir ! « Oignon du père, oignon du fils » rassemble l’immense autosatisfaction de tout ce qui porte robe, chasuble, babouche ou kipa. « Là-bas, c’est loi, mais c’est pas mieux » a l’immense avantage de ne pas nous faire regretter de vivre dans le royaume de la médiocrité, car il y a toujours pire ailleurs… « Bêtes de scène et autres plumeux » rassemble les perles de la fine fleur de l’intelligentsia télévisuelle et journalistique. Un régal !
Enfin, le petit volume s’achève sur « Les inclassables », qui n’en restent pas pour autant moins délectables. Les dictionnaires nous indiquent que l’autruche, même si elle figure sur la liste des espèces menacées, vit en moyenne soixante-dix ans (et quarante ans en captivité). Disons que si Fredo a commencé à décrypter les inepties de nos contemporains à l’âge de 10 ans et qu’il ne produise qu’un volume par décennie, nous sommes donc tranquilles jusqu’en 2063 ! D’autant que, grâce à leurs très longues pattes musclées, leurs genoux flexibles et souples, les autruches sont très rapides et endurantes.
Précipitez-vous déjà sur le premier tome !
À déguster avec parcimonie, car, ensuite, il vous faudra attendre encore neuf ans pour lire la suite…