La terre contre le nucléaire

mis en ligne le 20 juin 2013
Antonio Pagnotta, photo-reporter pour des journaux français et étrangers, est un habitué des zones interdites. À partir d’avril 2011, il est entré à plusieurs reprises dans la zone rouge de Fukushima. Sans parler des dangers liés aux radiations, toute personne qui pénètre la zone risque une amende ou un mois de prison, ou les deux. Antonio Pagnotta, a rapporté ces faits ignorés, risqué les interdictions et les radionucléides pour raconter la cruelle réalité d’un territoire contaminé. Il a été le premier, par ces photos dès 2011, à faire connaître cet agriculteur abandonné des siens et aujourd’hui admiré par le monde entier.
Au cours de ces deux années durant lesquelles Naoto Matsumura a résisté dans la zone interdite autour de la centrale nucléaire japonaise. C’est un ouvrage de témoignage émouvant nous révélant le courage, le combat et l’humanité de cet homme. Comment avec son esprit magistral, sa résolution il retourna vivre dans sa terre natale, à Tomioka seul dans sa ferme, tel un ermite, plutôt que de supporter une vie déracinée, d’un centre d’hébergement provisoire à un autre, plutôt que de supporter le regard discriminatoire de ceux qui ont eu la chance de ne pas être contaminés pour affronter seul, sans véritablement espoir de survie, la radioactivité extrêmement forte et nourrir les animaux irradiés mais encore vivants. Nous avons là, l’exemple d’une formidable réaction contre l’absurdité du monde. Le combat d’un homme qui aime la nature et la respecte. Une clef pour comprendre Naoto Matsumura, expliquer sa compassion envers les animaux, se trouve dans ses origines. Daisuke Matsumura, fondateur de sa famille, était moine, à l’époque Edo. Selon l’usage des bouddhistes japonais, il reçut un nom après sa mort gravé sur sa tombe : Seigneur de ce monde. C’est le titre le plus respectable qui puisse être donné, au Japon. Dans sa lutte, Naoto Matsumura porte toute l’humanité de celui qui refuse de se soumettre à la bureaucratie, à la finance et au lobby nucléaire, dont les choix sont d’abord économiques : sauver le pays de la faillite à n’importe quel coût humain, y compris le sacrifice des enfants.
À travers le lien qu’il entretient entre l’homme et la nature, le respect et le soin qu’il doit aux pierres, aux plantes et aux bêtes, il incarne la lutte de la terre contre le nucléaire, le jour après l’apocalypse. Matsumura est bien plus qu’un activiste écologiste ; pour trouver la force de survivre, et sauver sa ville, il puise dans le Japon de la sagesse et des philosophies ancestrales.



Fred Libert