Camarade travailleur, tu as le choix : mourir au turbin ou mourir de faim

mis en ligne le 22 mai 2013
Depuis des années, politiciens, patronat et médias nous disent inlassablement que le déficit cumulé des régimes de retraite ne cesse d’augmenter. Aujourd’hui, on avance même qu’il pourrait atteindre, en 2020, les 200 milliards d’euros ! À moins, bien sûr, « d’avoir le courage de dire qu’il faut une réforme des retraites » (dixit l’ex-patronne du Medef, Laurence Parisot)… Après les réformes de 1993 (Édouard Balladur), de 1995 (qui fut mise en échec par un mouvement social digne de ce nom), de 2003 (François Fillon) et de 2010 (Éric Woerth), c’est donc Jean-Marc Ayrault qui, sous les plis du drapeau socialiste, s’apprête désormais à essayer d’imposer la sienne. Faut dire que le bougre est « poussé » – mais ça ne doit pas le déranger le moins du monde – par une Commission européenne qui, en échange de l’octroi à la France d’un délai supplémentaire de deux ans pour réduire son déficit (le ramener à 3 % du PIB), a obtenu du gouvernement socialiste l’engagement de la poursuite d’une politique de rigueur budgétaire et de compétitivité articulée autour d’une réforme de fond du marché du travail et… des retraites !
Cette nouvelle réforme des retraites, le gouvernement espère la mettre en débat à l’Assemblée nationale dès l’automne prochain, sur la base de ce qui aura été « négocié » lors de la conférence sociale prévue pour les 20 et 21 juin. Pas besoin, toutefois, d’attendre cette nouvelle mascarade de négociations patronat-syndicats pour se faire une petite idée de ce qui nous attend au bout du chemin… Car, lundi 13 mai, le gouvernement a reçu le Medef et les syndicats représentatifs pour préparer cette conférence sociale printano-estivale. Et ce qui en est ressorti, bien que peu étonnant, n’annonce rien de bon pour les travailleurs, lesquels seront à nouveau la cible privilégiée des politiques économes.
Ainsi, Laurence Parisot, représentant le Medef, a exigé que le nombre des annuités nécessaires à la prise d’une retraite à taux plein soit augmenté à… 43 ! Et, bien sûr, que l’âge légal de départ soit fixé à 65 ans minimum. À ces caprices patronaux, s’ajoute la crainte – fondée ! – que le gouvernement intègre à cette réforme ce qu’il a entériné pour celle des régimes complémentaires (voir Le Monde libertaire n°1706), à savoir la désindexation du montant des pensions sur l’inflation (ce qui, une fois de plus, est synonyme de baisse du pouvoir d’achat des retraités).
Bref, rien n’est certes encore décidé – ce n’est que le début du merdier –, mais la promesse du candidat Hollande d’un rétablissement de l’âge de départ à la retraite à 60 ans paraît bien loin… Et, à contempler ce qui se profile, il semble que, au final, les travailleurs n’auront la possibilité que de choisir entre une pension réduite (rappelons que la pension moyenne s’élève aujourd’hui à moins de 1 200 euros) ou travailler – si toutefois leur âge avancé ne les a pas jetés dans les rudes bras du chômage – jusqu’à plus souffle (l’espérance de vie en bonne santé est évaluée à 62 ans en moyenne pour les hommes, et à 63 ans pour les femmes).
De leur côté, la CGT et FO sont montées au créneau, affirmant un refus ferme de reculer l’âge de départ à la retraite et d’augmenter le nombre d’annuités. Sur le papier et dans les discours, les représentants des deux confédérations syndicales demandent (et, sur ce coup-là, on ne peut qu’être d’accord et applaudir des deux mains) à ce que ce soit les grandes entreprises qui financent la protection sociale – dont les retraites –, avec un calcul du financement en fonction des politiques salariales (une boîte qui use abondamment de la précarité paye davantage) et des bénéfices dégagés chaque année (plus une boîte fait de bénéfices, plus elle participe au renflouement des caisses sociales). Thierry Lepaon, le nouveau secrétaire général de la CGT, a même proposé d’augmenter le Smic à 1 700 euros, avant d’affirmer que « le résultat d’une négociation, c’est avant tout le résultat d’une mobilisation » et de promettre un ample mouvement social pour la rentrée. Bien sûr, on aimerait le croire. Mais quand on voit la non-mobilisation contre l’accord national interprofessionnel, on est plus qu’en droit d’en douter sérieusement… Alors, ne mettons pas notre confiance dans les bureaucraties, le résultat de cette réforme ne dépendra que du rapport de force syndical que nous saurons imposer dans nos boîtes et dans les rues.