Léo Campion

mis en ligne le 11 avril 2013
On vient de rééditer Le Drapeau noir, l’équerre et le compas de Léo Campion. C’est une bonne nouvelle ! Les éditions KA ont encore frappé, autant dire un membre éminent du groupe John Cage de la Fédération anarchiste.
Si vous aller un 1er mai, vers 10 heures, au mur des Fédérés au Père-Lachaise, vous apercevrez de drôles de zèbres, hommes et femmes, avec des cordons bleus ou rouges en sautoir et qui, après plusieurs discours sur l’indépendance du monde à venir, chanteront Le Temps des cerises de leur frère Jean-Baptiste Clément, puis L’Internationale de leur frère Eugène Pottier. Vous pourrez aussi y voir des bannières noires brodées de devises hermétiques ou humanistes. En particulier un grand drapeau noir frappé d’une équerre et d’un compas argentés, ou bien un autre avec le logo taoïste du yin et du yang entouré de ces quelques mots : « Respectable atelier ni maîtres ni dieux. » Ces mêmes bannières qui défilèrent dans Paris le 21 avril 1871 et qui, plantées sur les fortifications, furent trouées par les balles versaillaises de monsieur Thiers, ce qui décida les 6 000 frères maçons à se rallier à la Commune de Paris et à rejoindre leurs frangins Jules Vallès, Élysée Reclus et Louise Michel, entre autres, et qui en faisaient déjà partie.
« Si les maçons anarchistes sont une infime minorité, la vocation libertaire de la maçonnerie est indéniable, elle est la seule association à laquelle puisse adhérer celui qui n’adhère à rien. » Voilà ce que raconte Léo Campion dans son livre. Il tente de créer un parallèle entre la franc-maçonnerie et l’anarchie, voire même de les concilier : ce sont deux philosophies sans dogme, progressistes et progressives qui ont l’homme comme dénominateur commun.
Léo Campion était un militant libertaire, objecteur de conscience, ami d’Ascaso et de Durruti, de Louis Lecoin et de Georges Brassens. Chansonnier émérite, il fut directeur artistique des cabarets Les Trois Maillets, le Caveau de la République et de la cave Le Tabou. Il y fit se produire le groupe des trois Léo – Léo Noël, Léo Ferré, Léo Campion –, Francis Lemarque, Cora Vaucaire, Catherine Sauvage, Lester Young, Sarah Vaughan, Boris Vian, Jean Poiret, Michel Serrault, Pierre Dac, j’arrête, la liste est interminable… Il soutint très souvent Le Monde libertaire, en venant raconter ses facéties de chansonnier montmartrois aux galas que la FA organisait en ce temps-là. Pour protester contre une injustice, il se présenta en loge tout nu, mais vêtu de ses décors maçonniques, sous prétexte que rien ne l’interdisait dans le rituel ! Peut-être ne pourrait-il plus le faire actuellement : le Grand-Orient de France (fédération de loges libres et souveraines) est maintenant mixte depuis déjà deux ans.
Donc Léo Campion, anarchiste et franc-maçon, est-il, comme les poissons volants, une exception ? Je ne le pense pas, puisque Proudhon, Bakounine, Kropotkine, Michel, Vallès, Élysée et Élie Reclus, Ferrer, Malatesta, Faure, Voline, Laisant, étaient dans la même situation… Il n’empêche qu’à la fin de sa vie Bakounine tint des propos très durs sur la maçonnerie (rapportés par Max Nettlau). Il critiquait un ordre qui était devenu pour lui un repaire de bourgeois qui s’étaient émancipés et qui se gardaient bien d’y faire entrer le prolétariat. Le débat reste ouvert… Lisez le livre de Campion, un humoriste qui avait un grand cœur et un grand sens critique. Pour des libertaires non dogmatiques, explique-t-il, tenter de se plonger dans l’aventure maçonnique est un beau voyage. Elle leur permettra de côtoyer des personnes qu’ils ne rencontreraient pas dans leur vie de tous les jours, et cela agrandira leur champ de vision et éclairera leur conscience. Cela diminuerait l’ego de certains militants de valeur, mais qui pourtant se croient positivement indispensables.
Campion parlait un jour avec son ami, notre camarade Maurice Joyeux, qui se défiait du rituel et qui ne voulait pas porter « de petit tablier » ! Léo lui répliqua gentiment : « Mais du rituel, tu en fais toute la journée, il y a cinq minutes tu viens de me serrer la main ! » Un abruti dit un jour de Léo Campion : « C’est un homme épatant, dommage qu’il soit anarchiste ! » Léo, mis au courant, répondit du tac au tac : « Je n’ai jamais dit d’un homme épatant, dommage qu’il ne soit pas anarchiste ! » Les chemins pour accéder à la sagesse sont multiples, n’oublions pas que dans le temps les anars se disaient frères entre eux et qu’ils luttent toujours pour construire la fraternité universelle. Si nous voulons provoquer la révolution sociale, il nous faudra convaincre bien des personnes !
Le livre fourmille d’anecdotes savoureuses sur des compagnons anars célèbres que Léo a bien connus, comme Hem Day, qui le fit entrer dans le mouvement. Si vous voulez approfondir le sujet, vous pouvez poursuivre en lisant un autre bon bouquin : Anarchistes, francs-maçons et autres combattants de la liberté d’Édouard Boeglin. Il vous faudra le commander bien sûr à la Librairie Publico, où, en 1972, notre camarade Maurice Laisant me remit les principes de base de la Fédération anarchiste.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


coluproges

le 19 mai 2013
Dans le cadre d'un livre actuellement en cours d'écriture, consacré à notre cher et vénéré campionissime es-humour et canulars, Léo CAMPION, (1905/1992)
chansonnier, humoriste, acteur et caricaturiste français, régent de Pygologie du Collège de Pataphysique et Grand Maître de la Confrérie des Chevaliers du Taste Fesses.je cherche des témoignages et documents divers le concernant.

Merci de votre aide.

Etienne MOULRON,
Fondateur et gardien du P.H.A.R.E, le Parti de l'Humour Attitude et d'en Rire Ensemble. http://lephare1.e-monsite.com/
emoulron@gmail.com