Un brûlot sous l’éteignoir, ou de la tendance des pouvoirs politiques à mettre en veilleuse le mouvement associatif

mis en ligne le 21 juin 2012
Cette toute dernière publication de notre camarade Justhom revêt un intérêt premier.
Justhom s’appuie tout d’abord sur le besoin des individus de se regrouper, relevé depuis le Moyen-Âge, afin d’unir leurs forces et mieux résister contre les différences oppressions : Église, seigneurerie, État, etc.
Pourtant, dès les prémices de cette volonté de résistance, l’Église devine tout l’intérêt à en dégager, par le maintien des populations dans une position de soumission à Dieu tout d’abord, puis au seigneur et à la royauté.
Ce type d’organisation aura été jusqu’à aujourd’hui un ferment de possible émancipation, par son réseau d’entraide, d’échange et de solidarité, mais surtout par son affirmation autogestionnaire.
De Fourier, condamnant toute société fondée sur l’échange tarifé et la concurrence, en passant par Saint-Simon qui met l’accent sur une nécessaire collectivisation par l’appropriation des moyens de production, et préconise donc de remplacer le gouvernement des hommes par l’administration des choses, jusqu’à Proudhon imaginant une association pluraliste de producteurs ou de compagnies ouvrières fondée sur l’égalité des contractants instituant entre eux des échanges équitables, la trame des penseurs anti-autoritaires s’inscrit durablement dès les premières années du XIXe siècle, et inspirera fortement les événements de 1848, par la création simultanée de caisses de secours mutuel, caisses de résistance, associations ouvrières de production, etc.
La peur des possédants et des tenants de tout pouvoir, y compris des partis politiques dits révolutionnaires, devant ce type d’organisation nouveau et dangereux pour leurs intérêts ou leurs projets, à base de démocratie directe et de mandat impératif notamment, n’aura de cesse que lorsque ce brûlot sera étouffé sous l’éteignoir.
Tous les moyens seront mis en œuvre par les grands traîtres de l’émancipation, de Le Chapelier qui édictera sa loi criminelle de 1791 « anéantissant toute espèce de corporations des citoyens du même état ou profession », en passant par l’empereur qui interdira toute organisation de plus de vingt personnes en 1810, en débouchant bien sûr sur Marx, le fossoyeur de la Commune qui se réjouira de sa défaite par le trop fameux : « Les ouvriers parisiens ont besoin d’une bonne leçon. » En cette fin du XIXe siècle, le mouvement mutualiste s’éloigne du mouvement syndical ouvrier, trop influencé par l’anarcho-syndicalisme.

L’État-oppresseur
Fourmillant de faits historiques, ce petit livre par son nombre de pages modeste, reste essentiel par le décryptage du mécanisme de nuisance mis en place de manière de plus en plus flagrante et castratrice par l’État-oppresseur.
Incapable d’assumer les responsabilités sociales (État-providence), dont pourtant il se targue d’être un ardent défenseur, l’État veut plier à sa volonté et à sa disposition le million d’associations fleurissant aujourd’hui dans tous les domaines : santé, culture, sport, solidarité par le jeu des subventions particulièrement. Même les structures associatives dites d’insertion pansent provisoirement (au mieux) les plaies provoquées par ce système d’exclusion, mais n’en remettent bien sûr jamais en cause la structure d’exploitation de celui-ci ; elles en présentent plutôt tous les aspects de l’alibi.
Pourtant, de nouvelles formes d’organisation ou de résistance voient le jour actuellement, en appliquant ces principes de démocratie directe, sans président ni structure hiérarchique. Les mandataires sont détenteurs de mandats ponctuels, tournants, impératifs avec obligation de rendre des comptes.
Elles se constituent, par exemple, autour de l’appropriation de locaux vides à fin d’hébergement d’urgence pour SDF, de création de lieux de résistance et d’animation culturelle, ou sous la forme de coordinations, collectifs, comités de solidarité, etc.
« Ces associations ne modifient certainement pas les stratifications économiques de la société mais, surtout dans les petites villes, elles contribuent à niveler les distinctions sociales, et comme elles tendent toutes à s’unir en grandes fédérations nationales et internationales, elles aident certainement au développement de rapports amicaux entre toutes sortes d’hommes disséminés dans les différentes parties du globe » (Kropotkine, L’Entraide, un facteur de l’évolution).
Un livre de salubrité publique et émancipatrice.

Guy, groupe de Rouen de la Fédération anarchiste