Nouvelles des fronts

mis en ligne le 17 mai 2012
Après la rose et ses senteurs, après la rose et ses couleurs, il nous restera les épines. Après l’état de grâce, les plans sociaux et l’austérité à l’espagnole ou à la grecque nous menacent. La droite machiavélique aurait-elle laissé la pseudo-gauche atteindre l’Élysée pour faire, comme à son habitude, le sale boulot : gérer la crise, privatiser, continuer les liquidations industrielles, la casse sociale et tutti quanti ? En bref, sauver le capital. À droite, laisser faire et revenir dans cinq ans en sauveur de la patrie. Tout est possible tant ces gens sont cyniques. Reste à la rue et à la mobilisation sociale à se faire entendre comme en 1936 où le mouvement ouvrier déborda, et de loin, les timides propositions sociales d’un front populaire issu des urnes avec, à sa tête, des radicaux socialistes par très radicaux, il faut bien le dire. À la rue, donc, de gouverner !
Aujourd’hui, des plans sociaux, gelés durant la campagne électorale, seraient attendus – ce qui n’étonnera personne d’un peu sensé – avec, à la clé, la suppression de 10 000 à 30 000 postes dans la téléphonie mobile, plusieurs milliers dans l’automobile… sans compter les 2 000 métallos de Florange toujours menacés. Mais, même durant la mascarade, le bal tragique des liquidations d’emplois, hormis sur les sites très médiatisés, a continué. Plus de 180 prolos sur le sable chez Belmonte à Montpellier, 800 chez Triskel en Haute-Garonne (un leader de la puce électronique sucé jusqu’au sang), 182 à Rennes chez Technicolor (ex-Thomson) sur 625 dans le monde ou encore 5 000 chez Néo-sécurité dont une belle brochette de mercenaires et de vidéo-ficheurs. Et, malgré le gong électoral et l’intervention du Sorti, ce sont 600 emplois perdus à la Sernam sur 1 400 et une soixantaine à la fonderie du Poitou. La toute-puissance a ses limites et les patrons voyous sont toujours en liberté sans surveillance. Le second tour passé et déjà General Motors à Strasbourg passe la marche arrière et s’apprête à se séparer de mille « faux travailleurs » qui, pourtant, avaient, sous promesse de reprise durable, consenti à de réels sacrifices (-10 % sur les salaires). Pour GM, c’est tout bénéf, un site racheté un euro symbolique, trois petits tours et puis s’en vont avec la plus-value. Belle opération capitalistique dont ne furent dupes que quelques naïfs et une bande de politicards avisés. Une nouvelle leçon de gestion à ne pas oublier !
Malgré ces temps d’élections pour certains, peut-être moins sensibles au vent du bulletin de vote, la lutte a continué. Grève des aiguilleurs du ciel contre les restructurations et les atteintes à leur statut, grève du transport privé dans l’Essonne, grève à Disneyland lors du vingtième anniversaire du parc à décerveler. Grève, aussi, aux terminaux méthaniers chez Elengy, filiale GDF-Suez, pour les salaires à Fos-sur-Mer. Et, encore tout récemment, grève à la SNCM à Marseille pour un statut unique des marins qui desservent la Corse et la fin des embauches de matelots « étrangers » sous pavillon et contrat de complaisance. À noter aussi, et c’est une quasi-première, la grève des nomades du nucléaire à la centrale EDF de Cattenom (là encore pour des questions de statut et de conditions de travail) ou, encore, la grève de solidarité à l’aéroport d’Orly contre le licenciement de 6 voleurs (récupérateurs) d’objets dans les poubelles. Comme quoi les élections passent, les problèmes perdurent et les luttes continuent. En attendant, les 16 000 postes prévus sur cinq ans à l’Éducation nationale promis par François II, les soldes enseignantes avaient débuté en Lorraine, on y a recruté sur le site leboncoin.fr. quelques enseignants manquants. En cette période libérale, tout s’achète et au meilleur prix. Petites victoires juridiques aussi avec la condamnation d’Air-France à 100 000 euros d’amende pour complicité de travail dissimulé au sein de sa filiale City Jet où des salariés vivant en France avaient été embauchés sous contrat de travail irlandais. Europe ma belle Europe. Condamnation de Radio France à 252 000 euros par les prud’hommes à verser à un humoriste pour licenciement « sans cause réelle et sérieuse » sauf d’avoir probablement déplu à Sarko et à son valet, le donneur du Val.
Hors les murs, pas de campagne, mais la fête bat son plein de licenciements. Sony en annonce 10 000 dans le monde ; la banque HSBC, 2 000 à Londres. En Allemagne, modèle de prospérité bien connu, « l’ANPE » locale supprime 1 000 postes, Lufthansa fait une coupe sombre de 3 500 emplois dans ses services administratifs et Q. cells, leader du panneau photovoltaïque, un marché d’avenir, en électrocute 15 000. Yahoo ! prévoit de supprimer 2 000 gentils collaborateurs sur le globe et le chimiste Merk, à Genève, petit joueur, n’en virera que 550. Et nous passerions, comme au temps de Tchernobyl, entre les gouttes, comme par magie « socialiste » ? Coup de baguette et de béret basque quand la Grèce s’enfonce à nouveau (21,8 % de chômeurs officiels à multiplier par au moins 1,5) que l’Espagne s’enterre (25 %) et que l’Europe affichait en février déjà pas moins de 17 millions de chômeurs. Qui peut encore être dupe ? Les aveugles et les sourds, bien entendu… En Grande-Bretagne au moins les choses sont claires, les impôts des plus riches ont été baissés de 5 %. Alors que les riches d’ici se cassent tous accompagnés des politicards aux ordres. Quant à la « dette », on se chargera de l’annuler.