éditorial du n°483

mis en ligne le 14 avril 1983
Hier, dans l'opposition, la gauche parlait de désarmement, de limitation et de contrôle des ventes d'armes, du refus d'une armée de métier et de la suppression de la légion étrangère, d'un renforcement des droits des appelés, d'une réduction du service national et d'une reconnaissance des objecteurs de conscience.
Depuis mai 1981, enfin au pouvoir, elle a pu appliquer son véritable programme :
- La recherche et la production militaires ont continué sur les mêmes bases, sécurité de l'emploi oblige !
- Les armées de terre, de mer et de l'air doivent posséder le matériel le plus sophistiqué et le plus meurtrier (sous-marins nucléaires, bombe à neutrons, missiles, etc.), dissuasion oblige !
- Les ventes d'armes sont encore plus importantes que du temps de Giscard. Les acheteurs n'ont pas changé, ils ont simplement augmenté. La France reste le troisième marchand de mort du globe, commerce extérieur oblige !
- L'armée de métier (plus de 50 % du personnel militaire) se développe. La légion étrangère, qualifiée hier d'armée de mercenaires, non seulement existe toujours mais la gauche s'en sert aussi bien que la droite. Le Liban a remplacé le Zaïre.
- La gendarmerie sert de plus en plus pour la répression ou autrement dit « pour la sécurité et la protection des populations ». Les militaires-flics sont préférés aux simples flics pour les postes importants. Deux tares sont-elles préférables à une ? La gendarmerie, enfin, a la possibilité d'augmenter ses effectifs, son armement et le contrôle de la population ;
- Grâce au protocole Hernu/Savary, l'armée, cette école du crime, de la soumission et de la phallocratie, s'installe dans l'enseignement pour faire des écoliers d'aujourd'hui les bons citoyens de demain.
- Le code du service national a changé le 6 avril 1983. Les appelés qui le souhaitent peuvent désormais accomplir leur service national à partir de 18 ans. Ils ont même désormais la possibilité de le prolonger de quatre à vingt-quatre mois, pour « acquérir une meilleure qualification, professionnelle ». Le slogan « l'armée vous offre un métier » (qui est faux si l'on met de côté les glorieuses professions d'assassins décorés et de buveurs de bière) reste à l'ordre du jour. Un soldat coûte moins cher à l'État qu'un chômeur, et il est surtout plus facile à contrôler. Pour les chefs d'entreprise appelés au service national, des « dispositions favorables sont prévues ».
On est tous égaux, mais certains le sont plus que d'autres. À moins que peut-être un patron, n'ait pas besoin de recevoir un bourrage de crâne militariste ?
- Une nouvelle condition pour un service militaire à six mois a vu le jour, il faut simplement que le nombre de volontaires pour la prolongation soit, suffisant (sic). Pour renforcer la militarisation, de la répression, le nombre des appelés désirant effectuer leur service en qualité de gendarmes auxiliaires passe à 15 % contre 10 % précédemment.
- Au nom de l'égalité des sexes, les femmes (pour l'instant: volontaires) peuvent désormais accomplir le service sur toutes les armes. On aurait bien sûr préféré un combat contre les parasites masculins : (procureurs, ministres, militaires, etc.) plutôt qu'une reconnaissance et un partage de ces lamentables fonctions.
- Après deux ans de pourparlers avec les organisations employant des objecteurs de conscience, des organisations pacifistes et des objecteurs de conscience, le gouvernement vient de décider d'offrir la possibilité d'accomplir un service civil soit dans une administration de l'Etat ou d'une collectivité locale, soit dans un organisme à vocation sociale ou humanitaire. La pénalisation par une durée du service double reste maintenue. Seul changement : la suppression de l'interdiction de faire connaître le texte de loi (interdiction depuis longtemps bafouée ouvertement) et l'obligation d'effectuer le service dans un organisme précis : ONF, SAC, BAS, etc. (obligation depuis longtemps contrée par l'insoumission massive des objecteurs). Deux ans pour pondre cela, bravo !