Délit de pédagogie

mis en ligne le 21 octobre 2010
Alors que plusieurs rapports (Inspection générale, Institut Montaigne) ont mis en doute l’efficacité des dernières réformes du ministère de l’Éducation nationale, des pressions et des sanctions continuent de s’abattre sur les enseignants qui n’acceptent pas ces réformes et, en particulier, celle de la suppression du samedi matin avec l’aide personnalisée…
Depuis 2008, le temps d’enseignement obligatoire est passé de 26 heures à 24 heures par semaine. Les deux heures supprimées sont proposées par l’enseignant aux familles des enfants en difficulté en soutien scolaire. C’est l’aide personnalisée, une surcharge de travail scolaire qui se fait au détriment des besoins de développement des enfants, des activités culturelles ou sportives pratiquées pendant ce temps par les autres enfants ou tout simplement du repos en famille. Une perte sèche de deux heures hebdomadaires d’enseignement pour tous, l’équivalent de trois semaines par an, avec cette triste certitude : le fossé culturel se creusera davantage entre les enfants des milieux populaires et les autres… C’est une mesure démagogique à caractère électoraliste, une décision imposée dans le déni des recherches en chronobiologie.
Avec une programmation annuelle qui dénie les cycles, ce sont « 24 heures chrono » compartimentées, morcelées en disciplines et sous-disciplines. Entre dix heures de français, cinq heures de mathématiques, quatre heures de sport et une heure et demie de langue vivante, que reste-t-il à l’histoire, la géographie ? Aux sciences ? À l’éducation artistique ?
Depuis plusieurs années des évaluations nationales (CE2, 6e, puis CM2) établissaient un diagnostic sur les acquis des élèves. Malgré leur lourdeur et les corrections, elles avaient été acceptées. Or, celles apparues en 2009 en CM2 puis en CE1 sont aberrantes : il faut dès janvier évaluer les élèves sur tout le programme de CM2 ; les exercices ne sont pas toujours adaptés ; la notation est sommaire (1 si l’élève a tout bon ou presque, 0 en cas d’erreur). Ces évaluations visent la performance, la concurrence au détriment des progrès et acquisitions des enfants.
Des enseignants, seuls ou avec d’autres, résistent car ces réformes écornent aussi bien les droits fondamentaux des enfants que l’avenir de l’école publique.
Deux enseignants membres de l’Icem ont été sanctionnés. Des sanctions non médiatiques mais d’autant plus pernicieuses ! Combien d’enseignants voient-ils ainsi leur carrière malmenée ?
C’est pourquoi nous reproduisons ci-après le communiqué de presse du CA de l’Icem-pédagogie Freinet * du 30 septembre 2010.
Dans le Tarn-et-Garonne, l’inspecteur d’académie a demandé une évaluation du travail fourni par Ninon Bivès. Il a corédigé et noté le rapport d’inspection avec une note si basse qu’elle ne s’inscrit même pas dans la grille départementale de notation. Pourtant, même une lecture attentive du rapport ne donne aucun élément pouvant la justifier.
En Loire-Atlantique, François Le Ménahèze, directeur d’école, qui était détaché auprès des IUFM des Pays-de-la-Loire en tant que formateur en temps partagé, s’est vu refuser le renouvellement de ce poste dans « l’intérêt du service », mais surtout « compte tenu de sa manière de servir et notamment son refus d’appliquer les instructions nationales ».
Ces deux enseignants se consacrent à l’éducation depuis de nombreuses années et ont choisi d’enseigner à l’école publique avec un investissement reconnu. Ils ont choisi la pédagogie Freinet car pour eux, elle permet à tous les enfants quels que soient leur culture, leur milieu social, leur pays, etc., d’apprendre, de comprendre, de créer, de s’exprimer dans le respect des valeurs que cette pédagogie porte (liberté, fraternité, égalité, dignité, compréhension, coopération).
Mais, depuis 2008, les réformes vont à l’encontre des principes et de la philosophie humaniste de la pédagogie Freinet. Voilà pourquoi ces deux enseignants s’y opposent en leur âme et conscience. Ils résistent et refusent d’appliquer des mesures qui desservent l’intérêt de l’enfant : évaluations qui discriminent et découragent, aide personnalisée qui stigmatise et exclut, temps d’enseignement qui se réduit et fatigue… Souffrance et désespérance sont le lot quotidien de nombreux enfants et de leur famille et ceci dès l’école maternelle. Comment pourront-ils se projeter dans une scolarité qui les rejette ?
Ces deux enseignants ne sont pas seuls : beaucoup, malgré les instructions officielles, continuent de mettre en œuvre une pédagogie émancipatrice et accueillante pour tous les enfants. Ces enseignants qui résistent et mettent en place d’autres pratiques servent l’école publique et donnent toute sa valeur au mot « pédagogie ».

Catherine Chabrun


* Institut coopératif de l’école moderne (www.icem-pedagogie-freinet.org/).



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


FLORI

le 20 février 2011
La pédagogie enseignante prend le travers la mise en chômage d'office tout individu certifié ou agrégative quel que soit le niveau parental qui a obligé les forces niveau de notes des examinateurs d'avant pour leur simplifier la vie du professeur ou de l'instituteur engagé ,tellement le niveau est si bas,si attérant que les familles aussi diplômées que leurs proviseurs se désespèrent sur leurs enfants nuls -peut-être-donc bientôt au chômage déclaré-mais leurs profs aussi à titre d'égalité heureuse en chômage permanent et par remis de sitôt par une dépression cyclique apprise par coeur devant médecins accomplis-son diplôme étant en berne de maîtrise.

mariethé

le 23 novembre 2011
PE retraitée, j'ai vécu pendant mes 8 dernières années dans l'enseignement, un harcèlement auquel j'ai résisté grâce à la réussite de tous mes élèves. Aujourd'hui, j'invite tous les enseignants décidés à vivre l'école autrement, à se grouper et à me contacter. Les responsables de l'échec des enfants ne peuvent rien contre des enseignants qui, eux, les font "réussir". Bien au contraire, car ils obtiennent en plus, l'appui des parents. Sur mon site, vous trouverez mes coordonnées: vivrelecole.com (par google seulement).
cordialement, Mariethé