« Le Rwanda : généalogie d'un génocide »

mis en ligne le 24 octobre 2004

Lecture

Pour ceux qui comme moi ne comprennent pas toujours l'actualité internationale et qui hésitent à se plonger dans de gros traités d'économie politique, la seule source sur les événement qui agitent le globe se résume souvent à la lecture du Monde et à l'écoute de RFI.

Heureusement, il y a des personnes consciencieuses qui se donnent la peine d'analyser, de chercher, d'approfondir et de livrer la synthèse de leurs travaux exposée simplement et en un nombre supportable de pages. Si, de plus, le prix à payer pour accéder à leurs textes n'est pas exagéré, ce n'en est que mieux.

Dans un petit (95 pages) livre pas cher (10 FF) Dominique Franche nous livre une analyse du génocide rwandais complétée d'une chronologie et de conseils de lecture... mieux qu'un Que sais-je : Rwanda : généalogie d'un génocide (éd. Mille et une nuits, coll. Les Petits libres, en vente à Publico). Le corps de l'ouvrage, à proprement parler, est la synthèse de trois articles antérieurs de l'auteur. La démarche est intéressante et les scribes de tous poils pourraient s'en inspirer ; à moins qu'ils ne préfèrent réserver leur science à une élite disposant du temps et de l'argent nécessaire à la collection des données.

Au-delà de l'événementiel, Dominique Franche nous explique comment les vieux mythes (de la «dualité nationale» - dont la première expression remonte aux Recherches de la France d'Estienne Pasquier (1560), il s'agissait pour lui du rapport des gaulois aux francs - au racisme à la sauce Gobineau) peuvent encore tuer à quelques jours du troisième millénaire (selon l'horloge chrétienne) et bien loin des pays qui les ont vus se développer. Bah ! Tous, nous savons que l'on exporte plus facilement ses tares que ses qualités.

La «dualité nationale», pour être succinct, est l'affirmation d'une explication ethnique aux différences sociales (en France, on opposait les nobles francs aux roturiers gaulois). Appliquée au Rwanda, et ceci dès la colonisation, cette bouillie fut calquée sur les Tutsis (les francs locaux) et les Hutus (assimilés aux sous-développés gaulois), d'après Dominique Franche. Avec en arrière plan, l'ombre de ceux qui avaient intérêt à instaurer un tel parallèle (colons, curetons, etc.) afin de s'approprier la suprématie sur les mythifiées sources du Nil, c'est une logique de mort que ce livre nous présente... une logique qui, hélas, aboutit à sa conclusion inéluctable : les massacres, la misère, les exodes... en bref, ce que nous avons tous lu dans les journaux ou vu à la télévision.