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par Gilles Durand • le 9 décembre 2019
UNE IDÉE NEUVE : L’ANTI-INDUSTRIALISME !
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Article extrait du Monde libertaire n°1811 de novembre 2019
Lord Byron n’est pas un anarchiste mais un très puissant poète romantique anglais. Il siégea peu à la Chambre des Lords. Il n’y fit que quatre discours. Son premier discours est pour défendre vigoureusement les ouvriers et ouvrières que les avancées techniques dans le tissage ont poussé au chômage et à la révolte luddite. Assez virulent, il justifie leur colère en décrivant leur extrême misère.
La révolte des Luddites, c’était il y a deux siècles. Actuellement, le discours techno-critique a du mal à se faire entendre sans railleries ni haussements d’épaules. Le « progrès », comme le capitalisme et l’État-nation, paraissent naturels à beaucoup. C’est difficile de prendre du recul tant notre quotidien nous accapare. Nous avons le nez dans le guidon et penser librement est devenu un luxe. Mais les anarchistes sont habitués à lutter contre les évidences communes.
Depuis un peu plus de deux siècles - ce qui n’est rien à l’échelle de la vie de l’être humain - se succèdent les révolutions industrielles. Ce sont des changements brutaux et incessants qui affectent nos conditions de vie. Les machines sont vite périmées, devenues obsolètes, H.S. - et nous avec ! Aujourd’hui, on ne répare plus, on jette et on rachète. Le progrès technique est très rapide, va de pair avec l’évolution du capitalisme et la financiarisation du monde. L’industrie a instauré de nouvelles conditions de travail, imposées aux forceps. Le XIXe siècle fut misérable, douloureux et meurtrier pour les ouvrières et les ouvriers. Au XXe siècle, le capitalisme apporte la modernité dans les maisons et dans les rues. C’est l’époque où « Moulinex libère la femme » ! On vend des voitures, des voitures, des voitures... Pendant ces « Trente Glorieuses », le capitalisme séduit le prolétariat grâce aux marchandises modernes, impensables sans l’industrie qui les fabrique.
L’industrie pollue et saccage la Terre. La nourriture ; dont on parle tant, a été complètement frelatée par l’industrialisation.
C’est la fin des langues locales. La télévision et les médias (et l’Éducation nationale !) ont tout unifié même les accents.
Aujourd’hui même, c’est la fin de la télé (ce n’est pas une grosse perte !) et, plus grave, du livre. Internet a tout supplanté. Alors que nous disposons de tant d’informations, nous n’avons jamais été si peu savants, perdus, déconnectés de la rugueuse réalité, malheureux... Des machines de toutes sortes nous entourent. Nous y sommes tous les jours confrontés. Les personnes âgées sont dépassées. Le progrès a été trop rapide pour elles. C’est une forme d’exclusion. On distingue ainsi les info-pauvres et les infos-riches. Je suis volontairement info-pauvre.
Les objets ont des « vies » cycliques. Un exemple : je suis grand amateur de musiques en tous genres. Dans les années 90, le disque vinyle était obsolète. Le CD l’avait supplanté. Je trouvais, notamment dans des vide-greniers, des vinyles très peu chers, bradés pour quelques francs. Aujourd’hui que le numérique bat son plein, on observe un retour massif du disque vinyle. On trouve de nombreux disquaires dans les villes. Leclerc et la Fnac s’y sont mis et en vendent en quantité. Le CD aujourd’hui ne vaut plus rien. Ce qui coûtait 100 voire 120 francs en 1990 coûte aujourd’hui 2 euros chez les soldeurs. On observe même, chez les personnes branchées, un retour de la cassette, car analogique comme le vinyle. Qui l’eut cru ? Un objet périmé peut revenir sur le devant de la scène. Ah, les multiples séductions de la marchandise, ses ruses de serpent !
On sait que les disciples de Saint-Simon, l’un des précurseurs du socialisme, ont été nombreux à se lancer dans l’industrie, notamment des gros chantiers (trains, canaux, etc.). Mais au-delà, c’est quasiment tout le mouvement ouvrier qui est technophile, anarchistes compris. Bien que Marx ne semble, parfois, pas dupe, les marxistes, notamment en URSS, ont poussé l’industrialisation le plus loin possible.
Aujourd’hui encore, ce sont les mêmes arguments qui sont avancés : Les machines font les travaux pénibles, l’homme travaille moins, la technologie est neutre, etc. C’est du niveau de « Moulinex libère la femme » ! C’est la même rhétorique du « progrès » forcément bienfaiteur. De nombreuses enquêtes peuvent être menées : le lien capitalisme/industrie n’est pas encore totalement clair. On confond Histoire et histoire de la technique. La santé est à l’avant-garde du progrès comme processus, comme idéologie et comme propagande.
Le capitalisme a tout noyé dans « les eaux glacées du calcul égoïste ». On peut dire de l’industrie qu’elle a, elle aussi, tout noyé de ce qui était humain.
Gilles Durand
La révolte des Luddites, c’était il y a deux siècles. Actuellement, le discours techno-critique a du mal à se faire entendre sans railleries ni haussements d’épaules. Le « progrès », comme le capitalisme et l’État-nation, paraissent naturels à beaucoup. C’est difficile de prendre du recul tant notre quotidien nous accapare. Nous avons le nez dans le guidon et penser librement est devenu un luxe. Mais les anarchistes sont habitués à lutter contre les évidences communes.
Depuis un peu plus de deux siècles - ce qui n’est rien à l’échelle de la vie de l’être humain - se succèdent les révolutions industrielles. Ce sont des changements brutaux et incessants qui affectent nos conditions de vie. Les machines sont vite périmées, devenues obsolètes, H.S. - et nous avec ! Aujourd’hui, on ne répare plus, on jette et on rachète. Le progrès technique est très rapide, va de pair avec l’évolution du capitalisme et la financiarisation du monde. L’industrie a instauré de nouvelles conditions de travail, imposées aux forceps. Le XIXe siècle fut misérable, douloureux et meurtrier pour les ouvrières et les ouvriers. Au XXe siècle, le capitalisme apporte la modernité dans les maisons et dans les rues. C’est l’époque où « Moulinex libère la femme » ! On vend des voitures, des voitures, des voitures... Pendant ces « Trente Glorieuses », le capitalisme séduit le prolétariat grâce aux marchandises modernes, impensables sans l’industrie qui les fabrique.
L’industrie pollue et saccage la Terre. La nourriture ; dont on parle tant, a été complètement frelatée par l’industrialisation.
C’est la fin des langues locales. La télévision et les médias (et l’Éducation nationale !) ont tout unifié même les accents.
Aujourd’hui même, c’est la fin de la télé (ce n’est pas une grosse perte !) et, plus grave, du livre. Internet a tout supplanté. Alors que nous disposons de tant d’informations, nous n’avons jamais été si peu savants, perdus, déconnectés de la rugueuse réalité, malheureux... Des machines de toutes sortes nous entourent. Nous y sommes tous les jours confrontés. Les personnes âgées sont dépassées. Le progrès a été trop rapide pour elles. C’est une forme d’exclusion. On distingue ainsi les info-pauvres et les infos-riches. Je suis volontairement info-pauvre.
Les objets ont des « vies » cycliques. Un exemple : je suis grand amateur de musiques en tous genres. Dans les années 90, le disque vinyle était obsolète. Le CD l’avait supplanté. Je trouvais, notamment dans des vide-greniers, des vinyles très peu chers, bradés pour quelques francs. Aujourd’hui que le numérique bat son plein, on observe un retour massif du disque vinyle. On trouve de nombreux disquaires dans les villes. Leclerc et la Fnac s’y sont mis et en vendent en quantité. Le CD aujourd’hui ne vaut plus rien. Ce qui coûtait 100 voire 120 francs en 1990 coûte aujourd’hui 2 euros chez les soldeurs. On observe même, chez les personnes branchées, un retour de la cassette, car analogique comme le vinyle. Qui l’eut cru ? Un objet périmé peut revenir sur le devant de la scène. Ah, les multiples séductions de la marchandise, ses ruses de serpent !
On sait que les disciples de Saint-Simon, l’un des précurseurs du socialisme, ont été nombreux à se lancer dans l’industrie, notamment des gros chantiers (trains, canaux, etc.). Mais au-delà, c’est quasiment tout le mouvement ouvrier qui est technophile, anarchistes compris. Bien que Marx ne semble, parfois, pas dupe, les marxistes, notamment en URSS, ont poussé l’industrialisation le plus loin possible.
Aujourd’hui encore, ce sont les mêmes arguments qui sont avancés : Les machines font les travaux pénibles, l’homme travaille moins, la technologie est neutre, etc. C’est du niveau de « Moulinex libère la femme » ! C’est la même rhétorique du « progrès » forcément bienfaiteur. De nombreuses enquêtes peuvent être menées : le lien capitalisme/industrie n’est pas encore totalement clair. On confond Histoire et histoire de la technique. La santé est à l’avant-garde du progrès comme processus, comme idéologie et comme propagande.
Le capitalisme a tout noyé dans « les eaux glacées du calcul égoïste ». On peut dire de l’industrie qu’elle a, elle aussi, tout noyé de ce qui était humain.
Gilles Durand
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