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Chroniques du temps réel
par jean-Luc • le 30 mai 2022
Les humeurs liquides coulent sans bruit...
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Les humeurs liquides coulent sans bruit. On y entend seulement, salement dit l’esthète, le clapotis régulier et obsédant de leur rythme binaire. Un son sans définition précise. Intraduisible et qu’on ne peut partager. Elles scandent une ambition défaite.
Parfois, le soleil, entre. Un rai aussi âpre que doux. Et le temps qui passe, et celui qu’il fait, se noient dans cet intervalle.
Tout semble alors si vain et si vaniteux… Douce chimère de l’ambition. Émoi fragile comme une ombre incertaine. On ne s’y noie pas.
On écoute l’hypnotique et répétitive lamentation des âmes en fuites. On flotte entre deux parce qu’on est gras et qu’il ne faut pas. Tant d’interdits vous condamnent.
Le silence qu’elles interrogent n’a pas d’écho. La solitude n’a pas d’amis. Il est le regard éperdu en quête de son horizon et sa demeure est un mirage, une ruine sans doute, celle de Troie, citée introuvable, un conte mis en demeure d’exister malgré les ronces et les éboulis et quelques traces de pillages, de feu, de larmes et de sang, des vestiges en somme, ceux d’une vie sur lesquels l’on reconstruit encore et encore des temples et des enceintes fortifiées. Une culture des abandons aussi et autant de trahisons. Un fructueux commerce.
Didactique comme on pisse un vin aigre au naturel. Rousseau nous tord les boyaux. Le présent a des allures d’éternité soumise aux lois du passé.
Une mère, un enfant, un soldat, deux ou trois silhouettes dissimulées dans les fumées des ruines qui sont un décor misérable et terrifiant, les traversent sans mot dire. Quelques balbutiements, plus exactement. Et rien n’y fait. Tout est défait.
Ceux qui tiennent le haut du pavé flottent toujours, bafouant ce qui eut été la dernière demeure de la dignité. Ils moquent notre stupeur. Sans refuge alors, sans larmes, privés de tout malgré le lamento des songes que l’on câline mécaniquement, nous allons, immobiles, dans ces interminables couloirs déserts.
Autant de labyrinthes éreintants. Bouvard écrit, Pécuchet peint, ils nous font la morale croyant nous jeter une bouée de sauvetage qui a déjà trop servi… à rien, jadis et naguère. Ils se flattent d’être ce qui nous répugnent. C’est un crime dont ils se disent innocents et plaident non coupables. A quoi bon, ils sont la loi du genre.
Les humeurs liquides sont ainsi. Dissolues quand nous les voudrions respectueuses. Édifiantes quand nous les aurions désirées banales d’humanité et si proches dans la simplicité de l’ordinaire. De sorte que jamais le réservoir ne se remplit. Une fuite sans doute. Une lézarde invisible. Une citerne pour rien. A force, ce n’est rien qui vaille. Le peu qui reste engendre la nostalgie et ses regrets. Tout ça pour ça !
Ces larmes ne servent à rien. Et pourtant on ne manque pas d’injonctions. Fais-toi plaisir ! dis le pharisien en ouvrant son officine. Terre d’escrocs. De temples en temples, le temps de la profession et des processions ne dure pas. Encore heureux !
Il n’existe aucun refuge, ni la lecture, ni ses complications, ni ses élans ne masquent l’éternel retour, à l’infini, du lamento qui n’en finit pas de se gaver des restes du festin des dieux. La digestion à son terme salit leur couche.
Les illusions perdues ressemblent à des châteaux hantés, vides et venteux, négligés des corbeaux eux-mêmes. Pasolini l’a montré, ils bouffent les moineaux après le prêche de Toto, Saint François d’occasion. Saine occupation des croyants.
L’esthétisme n’est plus qu’un moyen de sélection, le parcoursup des mises en demeure d’aimer son tombeau. La ségrégation a son visage.
Le désespoir ne fait plus recette.
Rien ne nous rassure.
Et comme Montaigne, nous observons nos selles avec un soin maniaque. L’hypocondrie est un moindre mal.
Je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire, le plagiat est d’actualité. C’est du Klapisch, mon gars, autrement dit du vent qui siffle dans les tuyauteries de la modernité, rigolarde dans le texte. Car même l’humour dégage une odeur d’eau souillée par la rouille. De toute façon, c’est ça ou la Javel.
C’est ainsi que nous n’en finissons pas de regarder un vieux Chaplin et Tati en mesurant le chemin effacé par cette mauvaise habitude prise avec l’usage d’en rire.
Alice, ma chérie, viens à mon secours ! Un « non anniversaire » me ferait tant de bien !
Jean-Luc
PAR : jean-Luc
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