Les loups sont dans Paris

mis en ligne le 10 novembre 2011
L’histoire a commencé samedi dernier lorsque des milliers de fondamentalistes catholiques ont manifesté à Paris contre la « christianophobie ». Environ 200 ont prié près du Théâtre de la Ville où se joue une pièce qu’ils jugent « blasphématoire » et contre laquelle ils protestent depuis plus d’une semaine. En début de soirée, 1 500 manifestants selon la police et 5 000 selon les organisateurs se sont rassemblés place des Pyramides, au pied de la statue de Jeanne d’Arc.
Ensuite, le cortège a rejoint la place André Malraux (à côté du Palais Royal) derrière une banderole : « La France doit rester chrétienne. » Un slogan qui, sans aucun doute, fait référence à l’idée de plus en plus répandue chez les populations racistes et xénophobes comme quoi « la France deviendra bientôt en majorité musulmane », mais qui fait également écho, à notre sens, à nos revendications, nous autres athées et libres penseurs, qui crions de plus en plus haut et fort que « la France est de moins en moins laïque et que l’Église se rapproche de plus en plus de l’État » – (voir les discours ciblés de Sarkozy et ses fréquentes visites au pape). Mais, pour sa part, tout ce joli monde scandait : « Christianophobie, ça suffit ! » Il est vrai que jusqu’à présent, il ne restait que les cathos à ne pas encore posséder l’équivalent des expressions de judéophobie ou d’islamophobie… Toujours en retard d’une mode, sinon d’une ou deux avancées de la science !
On comptait, parmi les manifestants, des prêtres en habit traditionnel (soutane) et de jeunes et moins jeunes individus portant tout l’attirail croquignol, du simple crucifix aux drapeaux du Sacré cœur et, la nuit tombée, autres cierges et flambeaux. Même leur dieu ne semblait pas de leur côté puisqu’ils ont été contraints de prier et chanter agenouillés sous une pluie battante, avant de se disperser en criant : « Tous au théâtre de la Ville » où se joue en ce moment la pièce de l’Italien Romeo Castellucci – Sur le concept du visage du fils de Dieu – que ces derniers jugent offensante. Pourquoi ? Dans les dernières minutes, un visage géant du Christ semble souillé par des excréments, en écho de la souffrance des deux personnages, un vieillard incontinent et son fils qui le lave et le change… On est pourtant bien loin des films de Buñuel, de La Vie de Brian des Monty Python ou encore de La Dernière Tentation du Christ, pour lequel plusieurs salles de cinéma avaient été incendiées.
En fait, seulement 200 parmi les manifestant se sont retrouvés face à un cordon de police qui protégeait le théâtre, mais ne les a aucunement empêché de recommencer à s’agenouiller et prier sous la pluie scandant : « Le blasphème ne passera pas ! », ou encore « Discriminés, on en a plus qu’assez ! » Il est bien dommage que personne (aucun responsable de la Ville de Paris, ou autre – Bertrand Delanoë n’ayant exprimé qu’une discrète « consternation et inquiétude face à ces tentatives de perturbation ») ne soit simplement venue leur rappeler que la loi interdit les prières publiques. Fait que les musulmans du quartier de la Goutte d’Or à Paris connaissent bien (ils se sont vu interdire les prières alors qu’ils réclamaient la construction d’une mosquée dans le quartier). Bien sûr, comme le rappelait le slogan des intégristes catholiques (« la France doit rester catholique »), cette décision à double vitesse doit certainement faire plaisir à Marine Le Pen qui, fin 2010, comparait « les prières de rue des musulmans à l’Occupation lors de la Seconde Guerre mondiale » et avait alors suscité une vive polémique. Il faut croire que visiblement, les prières des intégristes catholiques ne la dérangent nullement. Et peut-être encore moins le mouvement Civitas, à l’origine de la manifestation, qui revendique un millier de membres et est très proche de la Fraternité Saint-Pie X, fondée en 1970 par l’intégriste Mgr Marcel Lefebvre (1905-1991).
Samedi dernier, la manifestation s’est dispersée dans le calme vers 22 h 45 mais, depuis, tous les jours, l’extrême droite traditionaliste et intégriste assure une présence quotidienne devant le théâtre de la Ville, place du Châtelet, à la seule fin de harceler et intimider les spectateurs. Depuis, la mobilisation s’est élargie à des groupuscules violents tout aussi réactionnaires, racistes, antisémites et islamophobes comme Renouveau français, l’Action française ou le GUD, réclamant avec les intégristes la « re-christianisation de la France ». Entrée en campagne de l’extrême droite ou départ d’une croisade contre les infidèles et les hérétiques ?



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


Edith75

le 6 février 2012
... racistes, antisémites et islamophobes

étrange ce mélange des genres, mettre sur le même plan le racisme et l'antisémitisme avec le refus et la critique de religion.

Le fait d'avoir rejeté le christianisme et de critiquer les actions de ces religieux, fait-il de moi une vilaine christianophobe?

riztonmayo

le 3 février 2013
est ce parce que cet article n'a aucun intérêt qu'il suscite si peu de réaction? :)