Alerte à la lepénoactivité

mis en ligne le 14 avril 2011
1631AntifascisteLes crépitations de notre compteur Geiger-Führer
Lundi 4 avril, une conférence de presse a réuni trois groupuscules fangeux : Bloc identitaire (BI), Riposte laïque (RL), Résistance républicaine (RR). Il s’agissait de statuer sur la place des musulmans en France : « Il est possible de résoudre tous nos problèmes avec quelques mesures simples et de bon sens pour les musulmans, comme celles qui ont déjà été utilisées sous Napoléon pour que les juifs puissent devenir des citoyens français à part entière. » Sus aux mahométans, tel était le mot d’ordre de cette conjugaison des imbéciles. Pris entre le marteau UMP et l’enclume FN, il faut bien, pour exister, abattre des cartes prétendument inédites. Alors s’associent dans le même projet de bouter le musulman hors de France : le BI, excroissance national-beaufiste revendiquant un combat contre le « discours jacobin ultrarépublicain » dans lequel « la notion de citoyenneté républicaine désincarnée – et sans relation avec la filiation – est en opposition totale avec [sa] vision de l’identité charnelle et enracinée », précisant qu’« au concept de « France des lumières », [ils opposent] celui de la terre et des morts de Barrès 1 » ; RL et RR, revendiquant au contraire un républicanisme jusqu’au-boutiste – « Je suis une folle de 1789, de la République, des Lumières », explique Christine Tasin 2, la présidente de RR (compagne du président de RL, Pierre Cassen), autrefois passée par le souverainisme de Chevènement. Tous trois forment des diverticules 3 grotesques de ce « con-glomérat » insensé que sécrète une certaine France : un nationalisme qui se veut à la fois républicain, issu des Lumières (revendication première – et usurpation ultime – de RR) et barrésien ; un antilibéralisme pour mieux faire accroire (RR encore, BI également) qu’il y va de la survie de la classe ouvrière 4 ; un culte de l’apéro saucisson-pinard (moins classe que celui de l’Être suprême…) ; une haine des immigrés non européens, vus comme des envahisseurs, des voleurs d’emplois français ; une obnubilation fanatique quant à l’islam, qui serait non « pas seulement une religion, mais un projet politico-religieux totalitaire 5 » ; etc.
Tasin évoque ses accointances avec le FN de Marine Le Pen : « Son discours n’est pas xénophobe mais républicain et laïque. Il me semble le plus proche des valeurs que je porte. Quand elle dit, « stop à l’immigration », c’est du réalisme politique 6. » Elle a d’ailleurs écrit à Bernard Thibault, en défense de ce syndicaliste CGT qui s’est présenté sur une liste FN aux cantonales de mars. Elle l’admoneste ainsi sur son blog, au nom de la charte d’Amiens : « Une foule de cégétistes appuyée par des gauchistes et des sans-papiers (dont on se demande quelle est leur légitimité à manifester, eux qui osent défier les lois et la police), a hurlé sa haine et son intolérance, au passage de Fabien Engelmann. Ce dernier a été insulté, menacé physiquement, par une foule haineuse qui lui crachait dessus. Quelle terrible image pour votre organisation syndicale, qui se réclame des valeurs émancipatrices de la classe ouvrière, et prétend lutter contre le fascisme ! […] Osez dire que Fabien Engelmann ne défend pas mieux que vous les travailleurs français ET immigrés en s’opposant par son engagement politique à la venue d’une main-d’œuvre illégale qui fait baisser les salaires et monter le chômage des travailleurs. » Tout cela se passe de commentaires, en notant tout de même qu’Engelmann est membre de RR…
On appelle « oxymore » l’association de deux termes incompatibles (l’eau sèche, par exemple) ; on appelle « chimère » un monstre d’aspect composite. Tout cela relève de l’oxymore et du chimérique, mais tout cela fonctionne néanmoins, car le contexte idéologique actuel permet cette prospérité. Face aux chimères que sont les religions, d’autres chimères : des groupuscules aux paroles incantatoires (république, peuple, nation…), où le bicot a cédé la place au barbu, où le national-libéral se pare des vertus de l’anticapitalisme, où la saucisse et la Morteau ont remplacé la faucille et le marteau, où le péril arabe est perçu à chaque coin de rue. En un mot : la F(rance).
Religion, nein danke
Il faut être clair : la critique d’une seule religion est l’indice éloquent du travestissement d’un racisme pas encore totalement assumé. En revanche, la critique de toutes les religions est une nécessité, un combat vital. Aussi, face à ces confusions délibérément entretenues, cette lutte contre toutes les Églises et sectes ne doit pourtant pas s’estomper. La religion, ce pouvoir et cet instrument du pouvoir (pouvoir d’humains sur des humains, via le pouvoir d’une vue de l’esprit : une entité transcendante), ne peut rester indemne de nos plus sévères réprobations, dans le droit fil du plus essentiel pilier de la révolution anthropologique portée par le mouvement anarchiste : Ni dieu ni maître.




1. Manifeste du Bloc identitaire sur son site.
2. Liberation.fr, 2 mars 2011.
3. En anatomie, cavité normale ou pathologique communiquant avec un organe creux.
4. Au point que des syndicalistes, des syndiqués, s’y laissent prendre. Voir dans le présent Monde libertaire l’article de J.-P. Anselme.
5. Or les religions, notamment les trois monothéismes, ne sont rien d’autre que des projets à visée totalitaire.
6. Liberation.fr, 2 mars 2011.