Éducs, pas indics

mis en ligne le 29 février 2004

Environ 800 personnes déterminées ont manifesté vendredi 16 janvier dans les rues de Chambéry pour montrer leur opposition totale au protocole signé entre l'Association départementale savoyarde de sauvegarde de l'enfance et de l'adolescence (ADSSEA) et le conseil général de la Savoie, la gendarmerie, le préfet et le procureur.

Des éducateurs de toute la France sont venus soutenir leurs collègues éducateurs de rue à Chambéry, refuser en bloc cette injonction à la délation que leur impose ce protocole, et informer la population sur cette situation.

En effet, ce protocole, signé le 21 novembre 2003, prévoit une collaboration active entre les éducateurs de rue et les forces de l'ordre. Cette collaboration se traduirait concrètement par le signalement à la police des jeunes et de leurs actes. L'application de ce protocole rend tout simplement impossible leur travail.

« En effet, en tant qu'éducateurs, nous devons être les garants, dans la rue, d'un espace de dialogue où le jeune, quelle que soit sa situation, peut parler à un adulte en qui il a confiance et qui n'est là ni pour le juger ni pour légitimer ses comportements, mais pour entendre l'amorce d'une demande d'aide et de changement. Comment imaginer un jeune en difficulté ou en risque de délinquance, parler ou se confier à un éducateur sachant que celui-ci peut en référer à la police ? » (Extrait de la pétition des éducateurs de rue de l'ADSSEA).

D'autres protocoles de ce type ont déjà été signés à Arras, Angoulême, Orléans. Ces protocoles expérimentaux sont un avant-goût du projet de loi contre la délinquance, présenté fin janvier, qui prévoit que les travailleurs sociaux aient pour mission d'indiquer aux autorité « les enfants et les familles qui présenteraient des problèmes d'ordre sécuritaire ».

Tous les travailleurs sociaux sont donc directement concernés et risquent de devenir, de fait, des indics de la police. C'est une véritable instrumentalisation de l'action sociale par la police qui se profile.

Bien sûr, tout cela va dans le sens des dernières lois sécuritaires, des conseils locaux de sécurité de Chevènement à la loi sur la sécurité quotidienne de Vaillant, qui préfigurait celle de Sarkozy sur la sécurité intérieure : criminalisation de la pauvreté, contrôle social et fichage des populations, omnipotence de la police.

Fred, groupe Acratie, Chambéry