Les grenouilles en goguette

mis en ligne le 14 février 2013
1697grenouillesÇa valait le voyage, comme on dit dans le guide Michelin.
Passant par hasard devant l’Assemblée nationale ce mardi 29 janvier au soir, mon regard fut attiré par une drôle de troupe massée sur la place adjacente Édouard-Herriot. Quelques dizaines de personnes, dont certaines à genoux, se prosternaient comme des illuminés devant une crèche. Conforté dans cette idée par le décor composé d’une statue, une statue de la Vierge Marie, d’un tableau de la sainte Famille et d’une grande croix en bois, je me dis : « Tiens, ils tournent un film sur les anti-IVG de SOS tout-petit, allons y regarder de plus prêt. » Eh bien, pas du tout. On aurait pu en effet les prendre pour des doublures de cinéma (si les assistants de plateau n’avaient pas plus ressemblé à des robocops qu’à des intermittents du spectacle), mais pourtant ces catholiques intégristes-là se concentraient sur une cause non pas tout à fait différente, mais plutôt quasi similaire. Intrigué, j’acceptais avec une feinte nonchalance un de leur tract. Il s’agissait en fait d’un appel lancé par l’Institut Civitas à venir prier, tenez-vous bien, chers lecteurs mécréants, « contre les forces du mal ». Mais quelles étaient ces dernières ? Je lus, plus loin dans le texte, qu’étaient visés les élus favorables au projet de loi de mariage pour tous, dont l’examen commençait ce même jour au palais Bourbon. Des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes (mais pas de trans, ni d’accordéons, ni d’aveugles…) brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « Le mariage, un homme, une femme », ou encore : « Oui à la famille, non à l’homofolie ». Au signal du grand maître de cérémonie, tout ce beau monde se retrouve à genoux (sauf les culs-de-jatte, bien entendu). Je ne peux contenir un salvateur éclat de rire alors que certains prieurs, surpris par la pluie, enfilent des sacs plastiques sur leur pieux visage, comme on enfile des préservatifs sur des glands impurs… Ils ont l’air fin, avec leurs capotes sur la tête, leurs « Priez pour nous pauvres pécheurs » et autres « Ainsi soit-il. Alléluia ! » on dirait des caricatures. Heureusement, les prières de ces comiques troupiers sont interrompues régulièrement par les discours haineux de l’abbé Beauvais, le bien nommé prieur de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, et les harangues de l’abbé Régis de Cacqueray de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X en France – à faire trembler de peur les petits nenfants – où il était question de « l’affranchissement des lois de la nature qui mène plus sûrement au suicide » et de ces « personnes de même sexe dont on sait bien qu’elles assouvissent leurs passions avec des partenaires multiples dans des atmosphères souvent orgiaques et insupportables ». Pire que les pires scènes du Satyricon de Fellini, de Salo ou des Cent-Vingt Journées de Sodome de Pasolini.
Tandis que je prends connaissance de ces impuretés, c’est le moment que choisissent plusieurs députés du parti de la débauche (le PS) pour venir demander des comptes à la maréchaussée sur « la présence illicite d’une organisation d’extrême droite qui appelle à la haine » ; mais nos bons CRS leur barrent le passage et nos bons élus les menacent de demander des comptes au préfet de Paris. Ils promettent même de lui écrire.
Qu’ils restent bien devant leur téléphone, car le préfet ne va sans doute pas tarder à les rappeler avec des excuses bidon ; une fois de plus l’affaire sera classée dans les bannettes « divers » de nos chères institutions.
Fiers de leur courage, les députés retournent alors à leurs affaires et les intégristes à leurs prières.
Banalisation du fanatisme ordinaire.



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filocho

le 20 février 2013
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