Laurent de Merdici : le ministre le plus con du mois ?

mis en ligne le 19 mai 2011
Le sémillant Veau-Quiet, députain de Haute-Loire et du Puy-en-Velay, a vendu son âme pour une poignée de lentilles. Il s’attaque à « l’assistanat » (5 jours de travail gratos pour les titulaires du RSA et minima sociaux totalisés limités à 75 % du SMIC, donc de 1 073 euros nets). Il me rappelle le portrait de Dorian Gray, dont la belle apparence perdure alors que son âme, vendue au diable, flétrit. Remarquons, cependant, qu’il ne vise qu’un type particulier d’assistanat (ce « cancer de la société », dit-il, sans voir que sa diarrhée verbale l’apparente, lui, au choléra), celui des pauvres sans vrai emploi, comme l’avait fait son maître Tsarkozy lors de la campagne pestilentielle de 2007. Raskoltignac avait été alors inspiré par Patrick Buisson, ardent propagandiste et activiste de l’extrême droite, afin de racoler les voix du FN sur les thèmes de l’immigration, de l’insécurité et de l’assistanat. Veau-Quiet est donc un assistant de Rodotarin, assistanat qu’évidemment, il ne perçoit même pas. Il oublie aussi l’assistanat de son patron envers les riches (bouclier fiscal, disparition de 95 % des doits de succession, etc.). Seule l’assistance aux pauvres et autres précaires est à stigmatiser. Il devient clair que remontent là les remugles persistants de la réaction et la volonté présidentielle de dresser les gens les uns contre les autres afin de diviser pour régner. Ici, il s’agit de racoler les classes moyennes en voie de déshérence contre les assistés-pauvres car les premières, elles aussi en difficulté, ne veulent plus payer pour les seconds qu’elles accusent de fainéantise puisqu’elles seraient rétribuées à ne rien faire. Vieille rengaine de la droite louis-philipparde. Cela se fait en stigmatisant, au nom de la morale de Bouvard et Pécuchet, ceux qui devraient leur triste sort à leur irresponsabilité personnelle. Ce n’est pas de la rupture : le petit Thiers (avec talonnettes lui aussi) le disait déjà.
Ce qui ne manque pas de (gros) sel, c’est que le moraliste du Puy (on devrait dire plutôt du puits) est le président d’un groupuscule de « réflexion », en fait sous-parti UMP, dénommé « La droite sociale ». Bel oxymoron ! Qu’est-ce que ce serait si cette droite n’était pas sociale et même chrétienne ! Il est vrai que l’intérêt de ces sous-partis est de pouvoir recueillir des fonds électoraux en contournant les lois sur le financement des partis (voir l’affaire Bettencourt). Il semblerait que notre chevalier blanc ait lancé un ballon d’essai avec l’accord de Nikos 1er. Manqué : une partie de la droite (Fillon, Bachelot) se récrie et condamne la manipulation. Laurent de Merdici ignore visiblement que les minima sociaux en France sont loin d’être les plus élevés en Europe et il veut les diminuer. Il néglige que le RSA a été pondu pour faciliter la reprise de travail avec salaires à la baisse car le complément qu’il apporte (d’où son nom de revenu d’activité) évite au patronat d’augmenter les rémunérations. C’est le même principe que la prime à l’emploi inventée par le très libéral Milton Friedman (sous forme « d’impôt négatif ») en vue de faire baisser les frais de main-d’œuvre. C’est fait pour forcer les travailleurs à accepter n’importe quel job en maintenant un écart important entre les revenus d’aide et ceux d’activité. C’est le principe même de « l’armée industrielle de réserve », chère à Marx. Le députain de la Haute-Loire montre sa bassesse en flattant ses électeurs petits-bourgeois, sans doute cathos. Le Puy n’a-t-elle pas été récemment consacrée haut-lieu de la chrétienté par Rodoraskoltarintignac (mix, je le rappelle, de Rodomont, Tartarin, Raskolnikov et Rastignac) ? C’est oublier que le Moyen Âge catholique a été beaucoup plus clément pour les pauvres que la bourgeoisie libérale et capitaliste du XIXe siècle. Celle-ci a inventé les workhouses, les bagnes pour le vol d’un pain, la déportation des marginaux dans les colonies, etc. M. Wauquiez (ce n’est pas très français, ce nom ; cela ressemble à du flamand rosse) redécouvre ces horreurs. Il fait allusion à la fraude des pauvres aux prestations sociales sans préciser qu’elle monte à 800 millions pour 60 milliards. C’est très loin des escroqueries en tout genre des riches et des patrons qui, elles, se comptent par dizaines de milliards malgré la quasi-disparition de l’IRPP (47 milliards, soit 6,4 % des impôts), de l’impôt sur les sociétés (21 milliards – une misère), les niches fiscales (486 niches pour 73 milliards), les exonérations de cotisations sociales (30 milliards), etc.
Veau-Quiet est surtout un déma-gogues ; en tant que superdiplômé, il ne peut pas ne pas savoir qu’il ment effrontément. En effet, la logique du RSA inclut toutes les autres allocations, ce qui fait que nul « assisté » ne peut percevoir autant qu’un smicard touchant des aides complémentaires. Martin Hirsch vient de le lui rappeler, ce qui l’accuse directement de tromperie. De plus, contrairement aux assertions dudit Veau-quiet, un immigré (hors zone européenne de l’UE) doit déjà attendre cinq ans en emploi avant de pouvoir postuler au pactole social français, ce qui, du reste, contrevient aux règles européennes. Un titulaire du RSA est aussi tenu à chercher un emploi et ne peut pas refuser la troisième offre « raisonnable ». Il s’ensuit que notre chevalier blanc à la belle figure fait semblant de se battre contre les moulins à vent pour séduire Dulcino de l’Élysée, lui-même monté sur la Rossinante du thème efflanqué de l’assistanat, véhiculé depuis toujours par la droite réactionnaire. C’est pourquoi une partie de la droite UMP a réagi en disant : Laurent, tu viens de foutre la merde ici (d’où le titre de cette chronique) ; à quoi il pourrait répondre : Mais non, je me suis contenté de la remuer.
En plus, notre bonhomme raconte des conneries ; il demande que le RSA soit assorti de 5 heures de travail gratuit d’intérêt général dans les collectivités locales, les organismes publics, les associations d’intérêt public. Il devrait se demander si un tel travail, puisqu’il est utile, ne devrait pas être rémunéré car ne pas le faire serait priver les emplois aidés, notamment pour les jeunes, de tout intérêt. Les collectivités locales se mettraient en effet à préférer les 5 heures gratos aux emplois subventionnés. Par ailleurs, si ces travaux sont si utiles, pourquoi ne pas les transformer en emplois véritables, ce qui apporterait un début de solution au problème de la résorption du chômage ? Ce n’est pas parce que l’on est un énarque que l’on est dispensé de penser. Notre grand opportuniste et fayot oublie la fameuse étude menée dans le New Jersey, d’où il appert que les prétendus assistés au chômedu préfèrent de beaucoup avoir un boulot ; ils ne sont oisifs que parce qu’il ne trouve pas d’emplois car ces derniers sont rares, fort peu payés, précaires et déconsidérés, souvent occupés par des clandestins et pour cause. Il néglige que bien des « assistés » font déjà du bénévolat parce qu’ils sentent bien que l’aide qu’ils reçoivent leur demande une contrepartie.
Il y a plus croquignolet : le gazier contredit implicitement les promesses de Zébulon 1er. Il propose en effet de faire travailler pour rien alors que son maître avait dit qu’en travaillant plus on gagnerait davantage. Gnafron avait aussi promis de faire reculer la pauvreté de 30 % d’ici 2012. Or Veau-Quiet va la faire augmenter. En effet, la pauvreté est définie comme percevoir moins de 60 % du revenu médian (soit 950 euros actuellement). Plafonner les aides à 75 % du SMIC de 1 073 euros donne 802 euros, soit moins que le seuil de pauvreté, ce qui l’augmenterait de 1 million de personnes ! Et c’est avec retard que Naboléon II, qui avait autorisé le veau quiet à lancer son ballon d’essai anti-assistanat, s’est rendu compte de ces contradictions avec sa doctrine, d’où son tardif rappel à l’ordre.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


Nigau

le 3 juin 2011
Bel article, qui fait naître qq réflexions.
La saillie immonde (et télécommandée) de Veau-Quiet a 2 cibles :
- caresser la droite dans le sens du poil (ras) avec un argument électoraliste qu'on n'ose plus ressortir au Café du Commerce, même à l'heure de l'apéro.
- entretenir le sentiment "d'intranquillité" chez les prolétaires qui, à l'instar des cellules cancéreuses dans un organisme malade, prolifèrent dans notre société rongée par l'oligarchie de Naboléon IV.