En vrac

mis en ligne le 6 juillet 2004

Belle entrée en matière graphique pour Glucose, tout jeune graphzine dont je découvre le premier numéro. Problème : j'ignore de quand il date, mais bon, l'avantage avec ce genre de publications c'est que ça n'est pas périssable (du moins, rarement). On entre dans un univers graphique plutôt hétérogène, avec de la bédé portée par un certain sens de l'humour (notamment une aventure de Streum qui, sur trois pages, n'est qu'un pur prétexte à illustrer un calembour...), des dessins seuls en pleines pages, de courtes histoires troublantes et fantastiques (notamment l'excellente contribution à deux mains, signée Konsh et PZR), ou encore des trucs complètement barrés qui peuvent ressembler à de la poésie graphique ou quelque chose dans le genre. Au final, 24 pages de délires, tentatives, démonstrations, et d'imagination qui donnent un aperçu sur quelques talents de la mouvance graphzinesque, et sans doute de quoi nourrir quelques rêves éveillés (diverses substances liquides et/ou gazeuses peuvent éventuellement faciliter le phénomène). Plaisant et sans doute pas indispensable, soit, mais à quoi ressemblerait la vie si elle n'était faite que de choses strictement utiles ?

Glucose, 15 rue Poirier-de-Narçay, 75014 Paris, e-mail : stratalim@free.fr

Il est inutile, je crois, de présenter notre camarade et néanmoins ami Jean-Pierre Levaray, auteur d'un certain nombre d'ouvrages (Putain d'usine, Après la catastrophe, Classe fantôme, etc.), contributeur irrégulier mais fidèle de notre cher hebdo, et (ce dont on se souvient moins, de nos jours) créateur et animateur de feu On a faim ! monument du fanzinat qui a poussé et accompagné bien des individus sur les chemins de l'anarchisme, du punk, bref de la révolte en musiques et en mots. Jean-Pierre signe là un court opuscule aux éditions de l'Insomniaque, dans la collection De l'huile sur le feu : Désertion, plan social. On retrouve l'univers de l'usine et du salariat « cher » (c'est une façon de parler) à Jean-Pierre, milieu de toutes les aliénations, de tous les dangers, mais aussi de certaines solidarités parfois dérisoires (ah ! la scène du traditionnel apéro qui ouvre le bal !), toujours touchantes comme cette autre discussion autour d'un pot, entre l'auteur et des lecteurs, qui clôt l'ouvrage. Chacun des trois chapitres de la brochure est ponctué d'une intervention très personnelle de Jean-Pierre qui, sur un ton nettement plus pamphlétaire, dénonce avec force l'esclavage salarié, ceux qui l'exploitent, ceux qui le défendent, et les mécanismes d'aliénation qu'il engendre sur l'ensemble de la société. C'est écrit avec beaucoup de talent, et si la chose se lit en quelques minutes (en moins d'une heure, je veux dire), on la rumine encore longtemps après. Mais - et ce « mais » est sans rapport direct avec le présent ouvrage - une question me taraude : les anarcho-punks essaient par tous les moyens de ne pas perdre leur vie à la gagner, non sans difficultés ni contradictions d'ailleurs, quand les salariés vivent dans la peur du licenciement économique, non sans luttes ni critiques du capitalisme... Franchement, Jean-Pierre, ne regrettes-tu pas On a faim ! parfois ?

Désertion, plan social (L'insomniaque), un euro à Publico.

Attention ! s'ils déboulent sur votre platine le reste aura du mal à repousser derrière... Die Hunns, c'est le nom du groupe, vient de sortir son troisième (ou quatrième ? je ne sais plus...) album intitulé Long legs. 15 titres dont plusieurs reprises (Sex Pistols, Undertones, Wipers, etc.) dans la grande tradition du punk rock, genre qui dans cette galette trouve sa pleine et entière signification : les mélodies du rock'n'roll sur la sauvagerie du punk ! On sent que le combo a dû biberonner au son des anciens, tant il reprend la vieille recette toujours efficace des trois accords-refrain accrocheur-voix rocailleuse et solo destroy au final, le tout dans un format qui ne doit pas dépasser les deux minutes par morceau. Pour la finesse, euh, faudra repasser, hein. Après avoir maté la séquence vidéo en bonus sur le CD, un genre de clip d'une de leurs chansons, la philosophie des Hunns m'a semblé assez claire : tout à fond, dans le mauvais goût de préférence, et le reste n'a que peu d'importance (conception qui, ma foi, n'est pas dénuée de sens). Ce n'est pas LE disque de l'année mais c'est diablement efficace, et j'avoue qu'indépendamment de cette puissante zique, un groupe qui hurle au beau milieu de son skeud « I always believed in anarchy » me fera toujours craquer.

Die Hunns, long leg, Disaster records, www.disasterrecords.com